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Page:Bonaparte - Œuvres littéraires, tome 1, 1888.djvu/471

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et que tu sois contente ; mais, je le serai de recevoir de tes nouvelles, et de te donner des miennes. Je n’en dis pas davantage jusqu’à ce que tu aies comparé cette lettre à la tienne ; et, après cela, je te laisse juge qui est meilleur et plus ami de toi ou de moi. Adieu, mon amie, porte-toi bien, et sois juste pour toi et pour moi[1].

  1. Joséphine fut si heureuse de cette lettre qu’elle répondit aussitôt à l’empereur :
    « Mille, mille tendres remerciements de ne m’avoir pas oubliée. Mon fils vient de m’apporter ta lettre. Avec quelle ardeur je l’ai lue ! Et cependant j’y ai mis bien du temps, car il n’y a pas un mot qui ne m’ait fait pleurer ; mais ces larmes étaient bien douces ! J’ai retrouvé mon cœur tout entier, et tel qu’il sera toujours ; il y a des sentiments qui sont la vie même, et qui ne peuvent finir qu’avec elle. Je serais au désespoir que ma lettre du 19 t’eût déplu ; je ne m’en rappelle pas entièrement les expressions, mais je sais quel sentiment bien pénible l’avait dictée : c’était le chagrin de n’avoir pas de tes nouvelles.
    « Je t’avais écrit à mon départ de Malmaison ; et, depuis, combien de fois j’aurais voulu t’écrire ! Mais je sentais les raisons de ton silence, et je craignais d’être importune par une lettre. La tienne a été un baume pour moi. Sois heureux, sois-le autant que tu le mérites ; c’est mon cœur tout entier qui te parle. Tu viens aussi de me donner ma part de bonheur, et une part bien vivement sentie. Rien ne peut valoir pour moi une marque de ton souvenir. Adieu, mon ami ; je te remercie aussi tendrement que je t’aimerai toujours.
    « Joséphine. »
    Cette lettre fait, à coup sûr, autant d’honneur à celle qui l’a écrite qu’à celui qui l’a inspirée.