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Page:Bonnetain - Charlot s'amuse, 1883.djvu/289

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CHARLOT S’AMUSE

Il connaissait tous les magasins de ce genre dans le centre de Paris, du Palais-Royal aux Passages, et il les visitait l’un après l’autre, guettant les nouveautés, les reprises, les changements de tableaux.

Et ainsi, tout le long de sa route, il emmagasinait des désirs.

Il était tard quand il regagnait son quartier, avide d’être seul, marchant vite. Aux jours de fortune, il allait prendre l’omnibus à la Madeleine, pour trouver une voiture vide, car un de ses bonheurs était de se mettre tout au fond, à l’intérieur, le nez contre la vitre et, jusqu’à la station du Château-d’Eau, de voir dans un trot régulièrement rythmé les croupes larges et grasses des chevaux s’élever et s’abaisser avec un dandinement. D’inavouables envies lui venaient dans cette contemplation. Ahuri, il quittait l’omnibus, et jusqu’à sa porte, il rêvassait encore, cherchant quel mode d’onanisme il emploierait ce soir-là, s’arrêtant sous les becs de gaz pour tenir conseil avec lui-même, puis courant, comme s’il avait eu quelque amoureux rendez-vous.

Peu à peu, dans le détraquement blasé de son cerveau, il sentit devenir plus fréquentes les monstrueuses tentations qui l’assaillaient depuis quelques mois. Le jour, à son bureau, il