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Page:Bonnetain - Charlot s'amuse, 1883.djvu/335

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CHARLOT S’AMUSE

d’autre importance à ce changement de caractère, qu’il attribuait à l’accouchement. Le moment vint enfin, où, guérie tout à fait, elle s’abandonna de nouveau à ses caresses. Charlot éprouva une joie délirante et, toute la nuit, il n’entendit point, dans l’ivresse de son bonheur reconquis, l’enfant qui, oublié dans son berceau, geignait parce que son biberon était vide. Au matin, il ne put qu’à grand’peine se décider à aller à son magasin. Lorsqu’il revint pour déjeuner, à onze heures, ce fut Fanny elle-même qui l’invita à rester, et à oublier leurs chagrins passés dans une journée entière de plaisir. Et, jusqu’à la nuit, ils se vautrèrent, lui pareil à un satyre, elle toujours inassouvie, et, en même temps, plus tendre, plus câline, ne cessant d’embrasser son amant avec les étreintes qu’on a pour les êtres aimés qu’on ne reverra plus. Quand vint l’obscurité, ils s’endormirent, courbaturés d’amour. À l’aube, Charlot s’éveilla secoué par un cauchemar, et, tout à coup, il eut un grand cri. La place de Fanny à ses côtés était vide ; il était seul. Il se leva, chancelant, ayant le soudain pressentiment d’un malheur, mais luttant encore, ne voulant pas croire. Bientôt, il n’eut plus de doute : elle était partie. Et partie pour ne pas revenir. Sa petite malle n’était plus là, et, dans