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Page:Bonnetain - Charlot s'amuse, 1883.djvu/50

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CHARLOT S’AMUSE

inassouvie ; elle eut peur. Bientôt, la douleur lui arracha un grand cri, mais il lui ferma la bouche d’un baiser frénétique, et, alors, reprise par son rêve de jadis, elle sentit, brusquement, l’angoisse délirante d’une jouissance étrange l’envahir, décuplée cette fois. Elle rouvrit les yeux, et, comme la tête de l’abbé s’abattait à côté d’elle, elle le souleva. La folie de ses mystiques dévotions la reprenait. Hagarde, elle ouvrit le gilet du prêtre, entrebâilla la chemise, chercha la place du cœur, et, sur la peau blanche et fine du jeune homme, juste au-dessous du sein, elle colla ses lèvres enfiévrées.

C’est ainsi que dans la lande, ou pendant ses amoureuses insomnies, elle embrassait sur l’image coloriée le sacré cœur du Christ. Et comme le vicaire, sous cette étrange et douce caresse, l’étreignit de nouveau, elle sentit revenir ses divins spasmes. Soudain, l’œil convulsé, pâmée, elle se roidit, extatique, et mordit furieusement le sein de son amant, comme si elle avait voulu lui ouvrir la poitrine, pour voir, dans un cercle d’épines et sous une auréole de flammes, le cœur flambant jaillir, ainsi que celui de Jésus.

De ce jour, une existence nouvelle commença pour la jeune fille. Tous les matins, après la messe, elle entrait chez l’abbé, mais,