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Page:Borel - Rapsodies, 1868.djvu/34

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Heureux ! le serviteur à qui Dieu peut permettre,
Après quinze ans d’exil, de revoir son vieux maître :
                  Il vit, notre Empereur !

Jean, que simple on était de croire à cette perte :
J’étais bien sûr qu’enfin, de son île déserte,
                  Loin des rois la terreur !
Un jour il reviendrait debout, la lame nue,
Éveiller ses Français avec sa voix connue :
                  Il vit, notre Empereur !

Jean, que simple on était de croire que cet homme
Qui se sacra lui-même avec la main de Rome,
                  Et qui s’assit, vainqueur,
Déjouant le poignard, riant aux anarchies,
Sur le trône détruit des vieilles monarchies : —
                  Il vit, notre Empereur !

Jean, que simple on était ! croire que l’homme austère
Qui d’un geste, dix ans, a foudroyé la terre,
                  Mourrait comme un pasteur ;
N’entend-on pas le brick qui s’entr’ouvre et qui lutte,
Ou le cri du rocher qui s’écrase en sa chute ?…
                  Il vit, notre Empereur !

Jean, comme nous un jour, s’il doit quitter ce monde,
Le globe sentira la secousse profonde,