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Page:Bosquet - Une femme bien elevee.pdf/68

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avait fallu prendre la direction. Il avait alors sacrifié la muse sans hésitation, mais non sans regrets. On lui avait fait d’ailleurs tant de honte de sa manie poétique que, non-seulement il n’eût plus osé s’y livrer, mais qu’il en était demeuré dans un état de confusion qui n’avait pas peu contribué à donner à sa femme un empire absolu dans leur ménage. Auprès de Félicien, il sentait se réveiller la lyre si longtemps muette qui avait vibré autrefois dans son cerveau. Malheureusement toutes les idées poétiques qu’il exprimait étaient vieillies, flétries, diminuées, racornies comme la candeur d’une vierge qui a atteint ses quarante-cinq printemps.

Outre le peu d’agrément qu’il trouvait dans la conversation de ce pauvre homme, Félicien craignait de lui attirer des algarades ; car, lorsque madame Forbin s’apercevait qu’ils étaient ensemble, elle ne cessait de poursuivre son mari d’un regard irrité. Dès qu’elle en trouvait l’occasion, elle s’empressait de les interrompre en s’écriant : — Charles, va donc faire le whist : il manque un quatrième.

La poésie, envers laquelle madame Forbin, se montrait si rigoureuse, avait encore chez