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Page:Boucher de Perthes - Voyage à Aix-Savoie, Turin, Milan, retour par la Suisse.djvu/126

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J’indiquerai même un perfectionnement qui pourra séduire nos femmes à la mode : ce serait de tailler des baignoires en pleine glace. Alors elles pourraient reposer, nager même dans une piscine ayant l’éclat du diamant ou du cristal de roche, et sans y grelotter. Quiconque a parcouru les glaciers par un soleil d’été, sait que la température y est fort douce, parfois même un peu trop : j’y ai, pour mon compte, reçu autrefois un coup de soleil qui m’a, pendant quinze jours, rendu rouge comme une écrevisse.

Nous commençons à descendre en zigzag par une gorge d’aspect sinistre, et nous gagnons Hospital, nommé ainsi, soit par le voisinage d’un ancien hospice qui n’existe plus, soit par celui d’une famille du nom d’Hospenthale qui vivait aux environs.

Quoique la distance ne soit pas grande, l’attente du déjeûner me fit paraître la route longue. Quand la faim vient, la curiosité s’en va : on n’a d’yeux que pour ce qui se mange. Au total, je n’avais gagné à mon bain alpin que la fringale et d’avoir fait croire à mes Alsaciens que j’étais fou, idée qui ne les a plus quittés le reste de la route.

Nous voici enfin à Andermatt, position dominée partout par les montagnes, et des plus pittoresques. On n’y compte que six cents habitants, mais quelques jolies maisons lui donnent l’aspect d’une petite ville. On nous y sert un fort bon dîner auquel je fais honneur, et ma fatigue se dissipe. J’avais véritablement souffert de la faim.

La conversation roula sur ce que nous venions de voir. Ce passage du Saint-Gothard est vraiment des plus curieux ; ces cascades, ces pics, cette neige tran-