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Page:Boucher de Perthes - Voyage à Aix-Savoie, Turin, Milan, retour par la Suisse.djvu/229

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Le capitaine ne s’est pas trompé, nous voici bien en face de la station, car une cloche nous répond, et bientôt nous entendons un bruit de rames : c’est un canot qui approche. Quoique nous ne l’apercevions pas, on se prépare à le recevoir. Le voilà bord à bord : c’est une dame dont le visage est couvert d’un voile bleu, et qui a bravé le danger. Nous l’embarquons avec ses malles et sa femme de chambre.

Notre bateau rentre dans la nuée comme une divinité dans sa gloire, car à mesure qu’il gagne le large, la brume est plus intense.

La dame arrivée, comme une fée bienfaisante, semble nous avoir porté bonheur : le soleil s’efforce de percer la nue. Réussira-t-il ?

Nous avons à bord une étrange famille, le père, la mère, les enfants. Le père est un vieillard complètement imberbe. Ses deux fils, dont l’un paraît avoir trente ans et l’autre vingt-cinq, et qui lui ressemblent parfaitement, sont également sans barbe. Je crus d’abord que ceci venait de ce qu’ils avaient des rasoirs bien affilés et un bon barbier, mais vus de près, il était évident qu’ils n’avaient besoin ni de l’un ni de l’autre. Du reste, bien constitués, ils annonçaient, à leur mise et leur tenue, des gens aisés et bien élevés. La mère avait dû être belle, et une jeune fille, la sienne sans doute et la sœur cadette des deux jeunes hommes, était fort jolie.

Décidément le soleil est vainqueur ; le brouillard se dissipe, et nous voyons où nous sommes. À droite, nous avons un beau paysage. La côte plate commence à se relever et à s’étager vers la montagne.

Un village se montre à gauche ; au loin sont les mon-