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Page:Boufflers - Journal inédit du second séjour au Sénégal 1786-1787.djvu/74

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sans avoir pu avancer cinquante pas. Les plus grands arbres ne sont pas à quatre pieds l’un de l’autre et l’intervalle est rempli par des buissons, par des arbrisseaux, par des lianes de mille et mille espèces, car la nature est aussi féconde en espèces, dans ce pays-ci, qu’elle peut l’être ailleurs en individus et quoique notre établissement ne soit, à dire le vrai, d’aucune utilité pour le commerce, je le conserverai, ne fût-ce que pour nous procurer de beaux bois et pouvoir, d’ici à quelque temps, envoyer des gens instruits (toi par exemple) pour faire des observations et des collections plus intéressantes que tout ce qui a été fait dans ce genre-là depuis le déluge. J’oubliais de te parler du climat ; tu peux consulter là-dessus MM. Milton et Thompson ; il est marqué dans les poèmes, comme le Sénégal sur les thermomètres, pour indiquer le dernier degré de chaleur : cependant je ne la trouve insupportable que la nuit, parce qu’alors le vent tombe tout à fait et qu’on perd soi-même la respiration. Mais enfin on vit et c’est à peu près tout ce que l’homme a droit de prétendre ; pour moi je n’en demande pas davantage, parce qu’avec cela je tâcherai de me procurer quelque chose de mieux et ce quelque chose-là, c’est toi.


Ce 4. — Je compte retourner demain sur mon vaisseau pour mettre à la voile dans la nuit ; nous passerons encore deux jours dans la rivière pour faire mes provisions d’eau et de bois et nous reprendrons la route de Gorée, où je crois ma présence bien nécessaire pour les travaux que j’ai entrepris et qui sont suivis bien nonchalamment par les gens même qui doivent en jouir. Je com-