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Page:Bourget - Le Disciple.djvu/28

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LE DISCIPLE

chez son maître, enfonçait une de ses pattes dans la poche du gilet et cachait sa tête sous le bras du vieux concierge : « Allons, Ferdinand, dites bonjour à Mlle Mariette… » reprenait Carbonnet. Et le coq becquetait doucement la main de la fille, et son maître continuait :

— « Je dis toujours : Ne vous désespérez pas d’une mauvaise année, il en viendra deux tout de suite, et aussi des bonnes ; elles se suivent comme Ferdinand suit les poules ; n’est-ce pas, gourgandin ? »

— « C’est vrai, » répondait Mariette, « il faut en convenir, pour un brave homme, Monsieur est un brave homme ; quoique, pour la religion, c’est un païen, qui n’est pas allé une fois à la messe depuis ces quinze ans… »

— « Y en a tant qui z’y vont, » répliquait Carbonnet, « que c’est des gaillards qui vous mènent des vies de remplaçant entre quatre et minuit (catimini)… »

Ce fragment de conversation peut être donné comme le type de l’opinion que Mlle Mariette nourrissait sur son maître. Mais cette opinion demeurerait inintelligible si l’on ne rappelait ici les travaux du philosophe et l’histoire de sa pensée. Né en 1839 à Nancy, où son père tenait une petite boutique d’horlogerie, et remarqué de bonne heure pour la précocité de son intelligence, Adrien Sixte a laissé parmi ses camarades