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Page:Bourget - Le Disciple.djvu/58

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LE DISCIPLE

vinrent rapporter que Robert Greslou avait été très assidu auprès de la jeune fille, à l’insu de ses parents. On découvrit même une lettre qu’il lui avait adressée, datant de onze mois déjà, mais qui correspondait très bien à un habile effort vers un commencement de cour. Les domestiques et l’élève même du précepteur déposèrent encore que depuis huit jours les relations entre Mlle de Jussat et le jeune homme étaient devenues extrêmement tendues, de familières qu’elles avaient été. À peine si elle répondait à son salut. On tira de ces divers signes l’hypothèse suivante ; Robert Greslou, devenu amoureux de cette jeune fille, l’avait courtisée sans espoir, puis il l’avait empoisonnée pour empêcher son mariage avec un autre. Cette hypothèse emprunta une force singulière aux mensonges dont le jeune homme se rendit coupable dès qu’on l’interrogea. Il nia avoir jamais écrit à Mlle de Jussat ; on lui produisit sa lettre et on put même retrouver dans la cheminée de la victime, parmi des débris qui décelaient qu’on y avait beaucoup brûlé de papiers la nuit de la mort, une moitié d’enveloppe à l’écriture du prévenu. Il nia être allé cette nuit-là dans la chambre de Mlle Charlotte, et on le mit en face du valet de pied qui l’avait vu en sortir et qui soutint son dire avec d’autant plus d’énergie qu’il confessa être entré lui-même à cette heure-là dans la chambre d’une fille de service dont il était