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Page:Bourget - Le Disciple.djvu/77

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LE DISCIPLE

« Oui, » insista-t-il, et cette fois à voix haute, « je lui répondrai, et de ma meilleure encre… »

Il se trouvait derrière le chevet de Notre-Dame, et il s’arrêta pour considérer l’architecture de ce monument. L’antique cathédrale lui symbolisait d’habitude le caractère touffu de l’esprit germanique, qu’il opposait en pensée à la simplicité de l’esprit hellénique, représentée pour lui par une photographie du Parthénon contemplée autrefois durant de longues séances dans la bibliothèque de Nancy. Telle était sa manière de sentir les arts. Le souvenir de l’Allemagne subitement rappée changea pour une seconde le cours de sa pensée. Il évoqua presque malgré lui Hegel, puis la doctrine de l’identité des contradictoires, puis la théorie de l’évolution qui en est sortie. Cette dernière idée se rejoignit à celles qui venaient de l’agiter, et, tout en reprenant sa marche, il commença d’argumenter en lui-même contre les objections prévues de Dumoulin sur le cas du jeune Greslou. Pour la première fois depuis le début de l’entretien avec le magistrat, le drame du château de Jussat-Randon faisait réalité devant son intelligence, car il y pensait avec la portion réelle de sa nature, sa faculté de psychologue. Il oublia aussi bien Dumoulin que les inconvénients possibles du voyage à Riom, et sa tête fut absorbée tout entière par le problème moral que posait ce crime. La première question aurait dû être celle-ci :