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Page:Bourgogne - Mémoires du Sergent Bourgogne.djvu/114

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rien, car dans ce moment ma pensée était comme la sienne.

Il avait cessé de parler, et nous écoutions toujours sans nous rien dire, interrompus seulement par la difficulté de respirer d’un des hommes mourants, lorsque, rompant de nouveau le silence : « Cependant, me dit-il, les sons que nous entendons semblent arriver d’en haut ». Nous écoutâmes encore avec attention ; effectivement cela paraissait venir d’au-dessus de notre tête. Tout à coup, le bruit cessa ; alors un silence affreux régna autour de nous. Ce silence fut interrompu par un cri plaintif : c’était le dernier soupir d’un des hommes que nous gardions.

Au même instant, des pas se font entendre ; c’était un caporal qui arrivait avec huit hommes, pour enlever les deux mourants, mais, comme il n’en restait plus qu’un, il fut enlevé de suite. On le couvrit avec la dépouille des autres, et l’on partit.

Il était plus d’une heure du matin ; le froid avait diminué, car, depuis un instant, le vent avait cessé de se faire sentir avec autant de violence, mais j’étais tellement fatigué que je ne pouvais plus marcher, et, jointe à cela, l’envie de dormir me dominait tellement que, pendant le chemin, Beloque me surprit plusieurs fois arrêté et dormant debout.

Il m’avait donné des indications pour trouver Grangier, car des hommes de sa compagnie qui escortaient le seul fourgon qui restait au maréchal, avaient été voir leurs camarades et avaient indiqué le fourgon placé à la porte d’une maison où était logé le maréchal. Arrivé au point où nous descendions la rampe du rempart, afin de prendre la direction du camp où était le régiment, je me séparai du convoi funèbre, et je me décidai à suivre le nouveau chemin que l’on venait de m’enseigner, espérant atteindre bientôt le but de mes recherches.

Il n’y avait qu’un instant que je marchais seul, lorsque la maudite musique se fit encore entendre. Aussitôt je cesse de marcher, je lève la tête pour mieux écouter, et j’aperçois de la clarté devant moi. Je me dirige sur le point lumineux, mais le chemin va en descendant et la lumière disparaît. Je n’en continue pas moins à marcher, mais, au bout d’un instant, arrêté par un mur, je suis forcé de revenir sur mes pas ; je tourne à droite, à gauche ; je me trouve, enfin, dans