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Page:Bourgogne - Mémoires du Sergent Bourgogne.djvu/341

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Avant de nous ouvrir, on nous demanda qui nous étions et ce que nous voulions. Nous répondîmes que nous étions Français et militaires de la Garde impériale et que nous demandions si, en payant, nous pourrions avoir à loger, à boire et à manger. Aussitôt, on nous ouvrit la porte et on nous dit d’être les bienvenus. Nous commençâmes par faire mettre notre cheval à l’écurie. Puis on nous fit entrer dans une grande chambre où nous aperçûmes trois individus couchés sur de la paille ; c’étaient trois chasseurs à cheval de la Garde, arrivés dans la journée, mais plus malheureux que nous, car ils n’avaient plus de chevaux et, ayant les pieds gelés, ils étaient obligés de faire la route à pied. On nous servit à manger, ensuite nous nous couchâmes et nous dormîmes comme des bienheureux.

En nous éveillant, nous fûmes surpris de ne plus voir les chasseurs, mais le maître de la maison nous apprit qu’il y avait environ une heure, un juif voyageant avec un traîneau avait proposé aux chasseurs de les conduire à trois lieues pour deux francs, et qu’ils avaient accepté avec empressement. Nous apprîmes cette nouvelle avec plaisir. Après avoir payé la valeur de cinq francs qu’on nous demanda pour notre cheval et pour nous, nous partîmes ; notre bourgeois nous recommanda de toujours suivre les traces du traîneau qui nous précédait et qui conduisait les chasseurs.

Nous avions une longue marche à faire, ce jour-là : neuf lieues.

Après avoir marché toute la journée, nous arrivâmes, à la nuit, à Heilsberg, où nous devions loger. La première chose que nous fîmes, fut d’aller chez le bourgmestre chercher un billet de logement ; nous fûmes assez heureux pour nous voir désigner la même maison où nous fûmes assez bien reçus ; six chasseurs à cheval de la Garde s’y trouvaient déjà. On nous servit de la soupe, de la viande avec force bonnes pommes de terre et de la bière ; nous demandâmes du vin, en payant, bien entendu. On nous en procura à un thaler la bouteille (quatre francs) que nous trouvâmes bon et pas cher. Avant de nous coucher sur de la bonne paille, nous recommandâmes à notre bourgeoise de nous préparer à manger pour cinq heures du matin, car nous voulions partir de bonne heure, ayant encore une grande étape à faire.