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Page:Boussenard - La Terreur en Macédoine, Tallandier, 1912.djvu/232

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la terreur en macédoine

Méthodiquement, avec une adresse et un sang-froid superbes, la retraite continue. La grande route de la frontière est depuis longtemps masquée par les montagnes. Les assaillants reçoivent à chaque instant de nouveaux renforts.

Leur supériorité numérique devient écrasante. Mais, du moins, les patriotes ont sur eux l’immense avantage de connaître chaque repli de terrain, chaque anfractuosité.

Ils vont !… ils vont toujours, impassibles sous la grêle de balles, et peu à peu se rapprochent du refuge mystérieux créé par leur prévoyance.

Cette lutte poignante dure depuis près de deux heures !

Sanglants, épuisés, noirs de poudre, ces braves ont fait l’impossible et réussi à retarder la marche des bandits.

Le sentier monte toujours et contourne un dernier pic. Brusquement il oblique à droite et surplombe un précipice effroyable. Au fond mugit le Kriva qui se brise aux rocs à 700 mètres de profondeur.

« En avant ! mes amis, en avant ! » crie Joannès, d’une voix qui domine le fracas de l’abîme.

Encore deux cents mètres. Le précipice bientôt se resserre et forme une coupure large de vingt-cinq mètres, aux bords taillés à pic.

Au-dessus de ces deux murs de granit est jeté un pont grossier formé de trois sapins énormes qui relient les deux rives.

Du côté opposé, une petite redoute formée de rochers superposés défend ce pont et intercepte la vue.

Un hurlement de joie échappe aux patriotes. Der-