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la terreur en macédoine

— Il a fait dresser des blocs énormes sur d’autres blocs… et cela forme une muraille de cent pieds… une muraille à pic défiant l’escalade et le canon !

— Je vois aussi la poterne en fer… des plaques épaisses comme des pavés et sur lesquelles s’écraseraient des boulets !

— C’est là devant qu’il nous faudra combattre et mourir, pris entre deux feux et en vendant chèrement notre vie. »

Et pour la seconde fois, la jeune femme répond avec un soupir énigmatique :

« Qui sait ?

— Oh ! je t’en supplie… dis-moi quelle espérance folle te donne en ce moment la force de braver l’impossible… de me faire entrevoir le salut pour nous… pour ces braves… nos frères que la mort guette !

— Tu vas voir ! »

Le chemin tourne en colimaçon, au bord de l’abîme qu’il surplombe. Il arrive sur une esplanade assez vaste, que coupe la sombre muraille de roches accumulées. Au milieu et bien en face, la porte de fer peinte en rouge comme une plaque de sang étalée sur les pierres grises.

D’un geste rapide, Nikéa arrache de ses épaules son manteau albanais. Elle l’enroule autour de sa taille et en forme une longue jupe qu’elle agrafe solidement à la chaînette d’argent du col. Ainsi drapée, elle enlève son tarbouch et dénoue ses magnifiques cheveux blonds qui tombent en cascades sur ses épaules.

Joannès et les patriotes, interdits, la regardent sans comprendre. Étrange, sculpturale et réellement impressionnante sous cette longue traîne de pourpre,