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Page:Braddon - L’Héritage de Charlotte, 1875, tome II.djvu/188

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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

Il resta une heure dans son cabinet à arranger ses affaires pour le lendemain, puis il envoya chercher un autre cab et se remit en route pour Bayswater.

La foule qui se presse dans la Cité vers midi et le bruit qui s’y fait lui semblaient étranges, presque aussi étranges qu’à un homme qui revient d’une solitaire excursion dans les déserts d’une autre partie du monde.

Les volets étaient fermés dans sa maison, les fenêtres de sa chambre à coucher et de son cabinet de toilette avaient la vue sur la route, et c’est sur les fenêtres de ces deux pièces que ses regards se portèrent.

Il se représenta sa faible et sotte femme se plaignant et se lamentant derrière ces volets fermés.

« Et je vais avoir à endurer ses lamentations ! pensa-t-il en frissonnant. Je n’aurais plus d’excuses pour l’éviter. Mais, d’un autre côté, j’aurai le plaisir de signifier à Mme Woolper et à Mlle Paget d’avoir à quitter ma maison. »

Il trouva une sorte de méchante satisfaction à cette pensée ; il ne voulait pas endurer plus longtemps l’insolence de ces deux femmes ; le temps était venu où il avait à affirmer son droit à être le maître chez lui : une partie avait été hardiment jouée contre lui par Jedd et les autres, et ils l’avaient perdue. C’était lui qui avait gagné. Il pouvait maintenant congédier médecin, garde, amie, et amoureux.

La mort de Charlotte le rendait maître de la situation.

Il entra dans sa demeure, résolu à faire acte d’autorité à l’instant.

À l’intérieur tout était tranquille. Il regarda dans la salle à manger : elle était vide ; dans son cabinet : il était vide également.