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Page:Braddon - L’Héritage de Charlotte, 1875, tome II.djvu/227

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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

« Je ne suis que prince consort, dit-il en souriant. Je ne prétends pas à prendre un rôle actif dans l’administration de la fortune de ma femme. Je ne sais, en vérité, si je ne serais pas plus complètement heureux de notre mariage, si elle n’était pas l’héritière d’une si grande fortune. »

À ces mots M. Greenwood se laissa aller à un moment d’hilarité.

« Allons, allons, monsieur Haukehurst, s’écria-t-il, cela ne peut pas passer. Je suis un vieux renard, je connais le monde, et vous ne pouvez pas me demander de croire que l’idée de la perspective de fortune qui s’ouvre pour votre femme, peut vous causer autre chose qu’une franche et complète satisfaction.

— Vous ne pouvez pas le croire ? Non, peut-être, répondit Valentin d’un air pensif. Mais vous ne savez pas combien il s’en est fallu de peu que ces perspectives de fortune ne me coûtassent la perte de ma femme. Et même maintenant qu’elle est ma femme en vertu de liens que la mort seule peut rompre, il me semble encore que sa fortune pourrait amener une sorte de division entre nous. Il y a des gens qui me considéreront toujours comme un aventurier heureux, et mon mariage comme le résultat d’une habile intrigue. Je ne puis porter à la connaissance du monde que j’aimais Charlotte Halliday depuis le premier instant où je l’avais vue et que je lui avais demandé d’être ma femme, trois jours avant d’avoir découvert ses droits à la succession Haygarth. Un homme ne peut se promener avec un écriteau sur la poitrine. Je pense que ma destinée me condamne à être mal jugé durant toute ma vie. Il y a un an, j’avais peu de souci de l’opinion de mes semblables, mais j’ai maintenant le désir d’être