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Page:Braddon - L’Héritage de Charlotte, 1875, tome II.djvu/42

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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

S’il l’avait jugé utile, Sheldon aurait réprimé cette expression de mécontentement ; mais il ne considérait pas Nancy comme une personne d’une importance suffisante pour surveiller les jeux de sa physionomie.

Il y a des hommes qui considèrent leurs commis et leurs employés comme de la boue, à ce point qu’ils continueraient la fabrication d’un faux billet de banque ou qu’ils achèveraient un assassinat pendant que le jeune commis remet du charbon dans le feu, ou que l’enfant chargé des courses se tient la casquette à la main sur de seuil de leur bureau. Ils ne peuvent se faire l’idée que cette boue est composée de chair et de sang et que ces êtres infimes peuvent apparaître au banc des témoins pour les dénoncer.

De toutes les éventualités, celle qu’attendait le moins Sheldon, c’était que cette vieille femme, cette abjecte misérable qui dépendait de lui pour son pain de chaque jour, pût devenir un embarras pour lui ; il ne pouvait pas comprendre qu’il existe des circonstances sous l’empire desquelles ces abjectes créatures peuvent renoncer à leur pain et s’exposer à mourir de faim, plutôt que d’accepter leur moyen d’existence d’une main odieuse.

« Si vous avez besoin de renseignements, au sujet de la santé de Mlle Halliday, dit-il du ton le plus dur et avec ses plus mauvais regards, vous feriez mieux de vous adresser au docteur Doddleson, le médecin qui la traite. Je ne la soigne pas, vous le voyez, et je ne suis en aucune façon responsable de sa santé. Quand je soignais son père, vous m’avez fait l’honneur de douter de ma science, si j’ai bien compris votre ton et vos manières à cette occasion. Je n’ai pas besoin que vous