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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome I.djvu/116

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LA FEMME DU DOCTEUR.

En un mot, c’est une fête complète ; j’oublierai qu’il existe au monde un être comme le Démon des Galères, que je suis en retard d’un numéro, ce qui est vrai, et que l’artiste attend le sujet de la planche prochaine.

« Les petites filles viennent, naturellement, ainsi que Mlle Sleaford. À propos, j’aurai à t’interroger sur l’empoisonnement par la strychnine, parce que je crois que j’en userai une ou deux fois dans le Démon des Galères.

« Midi précis, n’oublie pas ! Nous viendrons en voiture. Tu pourras laisser ton cheval à Waverly.

« À toi.
« S. S. »

Oui, le Destin impatient d’une oscillation de la balance pour une chose aussi insignifiante que l’avenir de George jeta cette lettre dans le plateau et en détermina la chute. Le jeune homme lut et relut la lettre jusqu’à ce qu’elle fût froissée et souillée à force d’être pliée et repliée, mise dans la poche et retirée. Un déjeuner champêtre ! dans le parc d’Hurstonleigh avec Isabel ! Il devait, sans aucun doute, s’y trouver d’autres personnes ; mais George se le rappelait à peine. Il se voyait ayant Isabel près de lui, suivant les capricieux méandres des sentiers, pénétrant sous des voûtes mystérieuses de verdure formées par les branches basses des arbres qui se rejoindraient sur leur tête et les sépareraient du monde entier. Il se vit parlant à la fille de Sleaford comme il n’avait jamais parlé, et comme il ne parlerait probablement jamais, du moins pour des oreilles mortelles ; il arrangea et disposa cette journée comme il nous arrive si souvent d’arranger