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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome I.djvu/151

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LA FEMME DU DOCTEUR

Raymond se montrait d’une grande affabilité pour les fiancés. George se rendait à Conventford tous les quinze jours et dînait en famille à Oakbank. Parfois il arrivait assez tôt pour accompagner Isabel et les orphelines à l’église. Raymond n’allait pas à l’église, mais il envoyait ses petites nièces faire leurs dévotions, comme il les aurait envoyées chez le coiffeur pour leur chevelure, et chez le dentiste pour les soins de leur bouche. George se jetait à corps perdu dans les gilets extravagants pour faire honneur à ces dimanches bienheureux, et il quitta le deuil de son père un ou deux mois plus tôt qu’il n’en avait eu l’intention, afin d’apporter quelque variété dans son costume. Le moindre de ses vêtements avait toujours l’air neuf ces jours-là ; et Isabel, assise en face de lui à l’église, le contemplait d’un air pensif, lorsque le sermon était ennuyeux, et se demandait, avec une nuance de regret, pourquoi les vêtements qu’il portait ne prenaient aucun pli, mais conservaient un aspect dur et anguleux comme s’ils avaient revêtu d’abord un mannequin et en eussent conservé la rigidité. Il portait une chaîne de montre que son père lui avait donnée, une longue chaîne qu’il se mettait au cou, mais qu’il doublait et arrangeait artistement pour lui donner l’aspect d’une petite chaîne. Il y accrochait en guise de breloques une pièce d’argent percée et un antique petit flacon à sels en argent, ce qui, à distance, faisait l’effet de ces aiguillettes dorées que les officiers en garnison à Conventford portaient sur leurs gilets.

Les choses continuèrent ainsi pendant que les feuilles jaunissaient dans les bois du Midland, George suppliant sans cesse que le mariage se fît prompte-