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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome I.djvu/20

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LA FEMME DU DOCTEUR.

sionnés, à quelque jeune déesse de l’aristocratie, dont le nom était resté un mystère :

Lady Mable, pour foi, non, Lady May, pour toi,
Je n’entonnerai point un hymne de louanges.
Mais ma lyre par un silence plein d’effroi
Témoignera toujours des tortures étranges
De celui qui t’aimait, de celui qui te luit,
Luth brisé sous la main, et qui meurt dans la nuit.

Pendant que les grelots follement agités
Chantent sous les rayons du clair soleil, va, belle
De tes charmes autant que de tes faussetés,
Sûre de ne trouver nulle part un rebelle…
Mais crois que parmi ceux que tes yeux ont surpris
Un, du moins, te rendra mépris contre mépris !!!

— Maintenant, George, — dit Smith en repoussant un encrier malpropre et après avoir essuyé sa plume sur sa manche, — maintenant, George je suis tout entier aux devoirs de l’hospitalité. Tu dois avoir faim après ton voyage, mon bon vieux ! Qu’est-ce que veux-tu prendre ?

La chambre ne présentait pas le moindre vestige de buffet, et elle était d’ailleurs très-pauvre de meubles. La seule apparence de victuailles était représentée par une théière noire et fêlée sur son trépied et par un petit morceau de beurre sur une assiette placée sur la cheminée.

— Veux-tu prendre quelque chose ? — dit Sigismund. — Je n’ai pas grand’chose, vois-tu, parce que le temps me manque pour m’occuper de ces détails. Que dirais-tu d’un peu de confiture et de pain ?

Il ouvrit le tiroir du bureau devant lequel il était assis et exhiba d’un air de triomphe un pot de confiture où trempait une cuiller.