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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome I.djvu/84

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LA FEMME DU DOCTEUR.

la terre tant que la petite porte s’ouvrait et que le jeune visage qu’il aimait se tournait vers lui avec un sourire de bienvenue.

— Mes camarades ont parié que vous ne viendriez pas aujourd’hui, Jeff, — disait parfois George ; — mais je savais qu’il n’y avait pas de temps qui pût vous retenir.

Ô suprême récompense de la fidélité et du dévouement ! Qu’est-ce que Jeffson pouvait désirer de plus ?

Mathilda aimait tendrement à sa façon le fils de son maître, mais ses occupations ménagères étaient de beaucoup plus lourdes que les responsabilités de Jeffson, et il lui restait bien peu de temps à consacrer à la poésie de l’affection. Elle tenait parfaitement en ordre la garde-robe de l’enfant, faisait cuire de certains gâteaux fins à son intention spéciale, lui envoyait de magnifiques paniers dans lesquels il y avait de vastes pots de confitures de groseille, des pâtés de porc, des gâteaux au raisin, et des pommes tapées. Sous tous les rapports substantiels, Mathilda était comme son mari l’amie de l’enfant, mais ce dévouement tendre et sympathique que William montrait au fils de son maître était quelque chose qui dépassait son intelligence.

— Mon mari est fou de l’enfant ! — disait-elle.

J’ignore ce que William eût pu devenir si la destinée lui avait donné des gentlemen pour parents et avait placé dans sa main une plume au lieu d’une bêche. Mais je sais qu’il y avait en lui tous les éléments de poésie, et qu’une grande profondeur de tendresse et de sentiment se devinait sous la tranquille simplicité de son langage et l’affabilité de ses manières. Il était venu jeune encore dans le Midland, et il n’a-