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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome II.djvu/103

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LA FEMME DU DOCTEUR

heureuse. Oh ! Isabel, je vous ai aimée, parce que j’ai cru que vous ne ressembliez pas aux autres femmes. Dois-je, après tout, reconnaître que ce n’est que la vieille histoire : — la fausseté, le mensonge, la comédie ? C’était pour vous un triomphe que de rendre Roland Lansdell du Prieuré de Mordred amoureux fou de vous ; et maintenant qu’il devient gênant, vous l’envoyez à ses affaires. Voilà, je crois, ce que je dois penser. Ce n’a été, après tout, que coquetterie et fausseté du commencement à la fin.

— Fausseté ! Oh ! Roland, quand je vous aime si tendrement… si tendrement et si sincèrement ; non pas comme vous m’aimez… d’un amour cruel qui ne produirait pour moi que honte et infamie ! Vous ne pouvez jamais être pour moi plus que vous n’êtes maintenant. Nous pouvons nous séparer ; mais aucune puissance humaine ne pourra séparer mon âme de la vôtre, ou diminuer mon amour. Je suis venue vers vous aujourd’hui pour vous dire un éternel adieu, parce que j’ai appris que le monde qui ne comprend pas mon amour a dit sur moi de cruelles choses. Hélas ! comment ces êtres vulgaires pourraient-ils comprendre mon amour, quand vous-même, Roland, ne le comprenez pas ? Je venais pour vous dire adieu ; et demain ma vie sera finie. Vous savez ce que vous avez dit une certaine fois. Le rideau tombe et tout est fini !… Je penserai éternellement à vous, jusqu’au jour de ma mort. Hélas ! la mort elle-même effacera-t-elle votre souvenir ? Mais jamais je ne reviendrai ici pour vous voir. Je m’efforcerai de remplir à l’avenir mes devoirs auprès de mon mari.

— Votre mari ! — s’écria Lansdell avec un rire strident. — Ne ferions-nous pas plus sagement de laisser