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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome II.djvu/147

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LA FEMME DU DOCTEUR

vait venir prier aux pieds du prédicateur populaire.

Le matin, l’église était pleine, et Roland s’assit dans un banc près de la porte, attendant patiemment la fin du service. Isabel pouvait être cachée quelque part dans le vieil édifice, bien qu’il n’eût pu l’apercevoir encore. Il écouta très-attentivement le sermon et fit de la tête un ou deux signes approbatifs pendant le discours de M. Colborne. Il avait entendu un si grand nombre de mauvais sermons prononcés en diverses langues pendant le cours de son existence errante, qu’il n’avait nul désir de déprécier une bonne allocution. Lorsque tout fut fini, il demeura à la porte de son banc, regardant l’assemblée s’écouler lentement et tranquillement, et cherchant Isabel. Mais elle n’y était pas. Quand l’église fut tout à fait vide, il poussa un long soupir de regret, puis il sortit à son tour.

— Peut-être viendra-t-elle ce soir, — pensa-t-il. Oh ! comme je l’aime ! et quelle créature faible et misérable il faut que je sois pour en être arrivé là ; pour sentir cette défaillance au cœur à l’idée qu’elle n’est pas là ; pour trouver l’univers entier vide et désert parce que ce visage est absent !

Il sortit et se dirigea vers un angle isolé du cimetière, un coin plein d’ombre, où se trouvait un retrait du vieux mur au pied duquel la rivière se glissait au milieu des herbes marécageuses. Dans cet endroit, les saluts qu’échangeaient les fidèles arrêtés devant la porte de l’église ne parvenaient plus que comme un faible et lointain murmure ; et Lansdell put s’asseoir à loisir, le dos appuyé sur le parapet, contemplant d’un œil distrait les flots bleus de la Wayverne et pensant à ses peines.