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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome II.djvu/98

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LA FEMME DU DOCTEUR.

tout le bonheur de ma vie à venir dépend de votre réponse.

— Monsieur Lansdell !…

Elle le regarda — très-effrayée par ses manières, mais tenant toujours sa main dans la sienne. La chaîne devait être si prochainement rompue. Elle n’avait plus que quelques minutes encore à garder cette main chérie entre les siennes. Encore une demi-heure, et ils seraient séparés pour toujours. La douleur de cette pensée se mêlait étrangement avec la joie ineffable de se trouver avec lui, d’entendre de ses lèvres l’aveu de son amour. Que lui importait Gwendoline, maintenant ?… cette cruelle et jalouse Gwendoline qui avait outragé et insulté la pureté de son amour.

— Isabel, — dit très-gravement Roland, baissant la tête à la hauteur de la sienne tout en lui parlant, mais regardant la terre plutôt que sa compagne, — il est temps que nous mettions fin à cette farce de respect et de soumission pour le monde ; nous avons essayé de nous soumettre et de gouverner notre vie d’après les lois que les autres hommes ont édictées. Mais nous ne pouvons pas… nous ne pouvons pas, ma chérie. Nous ne sommes que des hypocrites qui essayent de masquer leur révolte d’un semblant de soumission. Vous venez ici, nous nous rencontrons et nous sommes heureux ensemble… d’un bonheur indicible et pur. Mais vous me quittez et allez retrouver votre mari ; vous lui souriez et vous lui dites qu’en faisant votre promenade vous avez rencontré M. Lansdell ; bref, vous lui jetez de la poudre aux yeux, vous le tournez en dérision, vous jouez une comédie perpétuelle pour le tromper. Tout ceci doit cesser, Isabel. Le philo-