Aller au contenu

Page:Braddon - La Trace du serpent, 1864, tome I.djvu/60

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
52
LA TRACE

Souvent aussi, des têtes fatiguées ont dormi plus profondément sur ce lit hideux, sombre et gluant, que sur des couches de duvet.

Oh ! puissions-nous ne jamais songer à demander la paix du sommeil à une telle couche !

C’est une rivière sombre, laide et pernicieuse, une rivière qui ne vous parle que de peines, de douleurs et d’angoisses ; une rivière que certaines pauvres créatures mortelles et impressionnables, qu’un nuage attriste et qu’un rayon de soleil ranime, feraient bien de ne pas regarder.

Je me demande ce que cette femme là-bas pense de la rivière ? C’est une femme pauvrement vêtue qui porte un enfant dans ses bras. Elle va et vient lentement sur une des rives, par cette après-midi du jour où le meurtre de M. Montague Harding a été commis.

C’est un endroit bien solitaire que celui qu’elle a choisi à l’extrémité des faubourgs de Slopperton. Et la ville de Slopperton n’étant à tout prendre qu’une ville très-laide, est encore bien plus laide dans ses faubourgs. Ceux-ci consistent en deux ou trois manufactures, une grande diablesse de prison, dont les murs sont plus insensibles que le roc, une rangée de maisons mesquines, quelques constructions neuves inachevées, et d’autres anciennes et à demi ruinées qui pendillent autour de Slopperton comme les lambeaux d’étoffe qui frangent un vêtement usé.