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Page:Braddon - Les Oiseaux de proie, 1874, tome I.djvu/12

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LES OISEAUX DE PROIE

CHAPITRE II

VIEUX JOURNAUX

L’aspect de Fitzgeorge Street était froid et sombre, sous un ciel gris du mois de mars, lorsque Sheldon revint à Londres, après une absence de huit jours. Il avait été à Barlingford et avait employé ces quelques jours de congé à revoir ses anciennes connaissances. Le temps avait été déplorable pour les promenades en dog-cart, les grandes courses à cheval où les hommes et les bêtes s’animent, veulent se dépasser : une bourrasque avait failli renverser Sheldon dans les rues de sa ville natale, et un bon quart d’heure durant l’avait secoué, lui barrant le passage et l’empêchant de frapper à la porte de ses parents. Ce mois de mars avait été particulièrement rude. Il n’était donc pas surprenant, à son retour en ville, que ce voyage n’eût fait aucun bien à Sheldon.

« Cette semaine vous a changé, » lui disait la vieille femme du comté d’York, en posant sur la table une côtelette et la tasse de thé avec la théière, le sucre, le lait.

Sheldon mangea très-vite. Il semblait qu’il eût hâte de se débarrasser de la présence de sa vieille ménagère et qu’il fût gêné de la voir le questionner. Elle avait été sa nourrice, et, se souvenant des petites tendresses familières de l’enfant nerveux qu’elle avait nourri, elle se laissait souvent aller avec son maître à des façons plus libres que celles des serviteurs, même les plus estimés et les plus anciens. Elle le regardait furtivement, pendant qu’il était assis dans un large fauteuil au dossier