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Page:Brassard - Péché d'orgueil, 1935.djvu/262

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Une joie surhumaine l’enveloppa, et elle glissa sans bruit sur le parquet, évanouie.

L’air frais du matin venant de la fenêtre ouverte, la ranima. Avait-elle été longtemps inconsciente ? Le jour pointait dans toute la gloire du ciel pur. Elle se souvint, et la beauté de son regard éclipsa celle de l’aurore. Elle se leva. Un murmure de prière venait d’à côté ; sans hésitation, Alix ouvrit doucement la porte, et un spectacle impressionnant s’offrit à ses yeux : un prêtre à cheveux blancs, tout courbé, administrait l’Extrême-Onction à Étienne Bordier. Paul essuyait, d’une main qui tremblait, les sueurs qui coulaient du front de son père, Eustache et Jeanne pleuraient agenouillés au pied du lit ; tante Marie disait son chapelet, et sa voix chevrotante se fêlait souvent comme si elle allait se briser.

Alix vint prendre place à côté de son mari. Celui-ci suivait fasciné, le mouvement des doigts du prêtre qui mettaient le sceau suprême du pardon à ce corps dont la tâche était finie.

Sur une dernière bénédiction, le prêtre se retira, un peu plus courbé, ému de la douleur des autres.

Aux premiers coups de l’angélus, Étienne Bordier s’éteignit doucement.

Épilogue

Paul resta terrassé par la mort de son père. Sur cette douleur navrante, Alix ne voulut pas tout de suite verser la joie : on ne mélange pas deux parfums de prix. Elle était femme, et femme amoureuse, elle saurait deviner quand jeter l’aveu.