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Page:Bremer - La Vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 1.djvu/249

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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

importante. En même temps son cerveau voulait s’occuper sans relâche de grandes pensées et de grands buts. « Pouvez-vous, dit-il à ses amis pendant les derniers jours de sa vie, m’aider à ramener mon âme aux choses journalières, et à la détourner de ses visions de l’infini, de ce torrent de pensées ? » Une fois il interrompit la lecture qu’on lui faisait en disant : « Laissez cela et parlez-moi de l’homme, de ce qui le concerne. »

Dans sa dernière lutte sans douleur on l’entendit répéter souvent : « Père céleste. » Ses dernières paroles furent : « Je ne me souviens pas que mon cœur ait jamais été autant inondé de reconnaissance pour la bonté de Dieu que dans ce moment. » Et les derniers mots qu’il balbutia furent ceux-ci : « L’esprit m’a envoyé plus d’un message. » « Il s’affaiblissait à mesure que le jour avançait, dit son biographe. Nous l’aidâmes à se tourner vers la fenêtre d’où la vue se prolongeait sur les vallons et les hauteurs boisées à l’est. Nous tirâmes le rideau et la lumière tomba sur son visage. Le soleil venait de se coucher, les nuages et les nuées étaient étincelants de pourpre et d’or : il respira avec toujours plus de lenteur jusqu’au moment où son corps s’endormit sans pousser un soupir. Nous ne nous aperçûmes pas du moment où l’esprit le quitta. »

Ce n’est qu’un individu ressemblant au soleil, un homme aimé de Dieu et dans le cœur duquel habite son esprit, qui peut mourir de la sorte. Je juge aussi du pouvoir que ce véritable chrétien a exercé sur ses semblables par la petite circonstance suivante.

Je me promenais un jour dans les rues de Boston au bras de Benzon. En passant devant une maison, il baissa la tête avec respect en disant : « Depuis des années, je ne puis m’approcher de cette maison sans éprouver des sentiments