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Page:Bremer - La Vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 1.djvu/259

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DANS LE NOUVEAU-MONDE.

ressemble à la vieille sorcière qui fit tomber le dieu Thor[1], en plaçant devant lui un croc-en-jambe. C’est une maladie désagréable, empoisonnée, qui se glisse comme un serpent, comme un vampire, s’approche de l’homme pendant les ténèbres et suce la quintescence et la moelle du corps, de l’âme et des nerfs. La moitié ou les deux tiers des habitants de ce pays souffrent ou ont souffert dans une proportion quelconque de ce mal. Il faut, je le maintiens, l’attribuer à la nourriture, au genre de vie, aux appareils de chauffage dans les appartements, qui seraient nuisibles dans n’importe quel pays, et sont mortels dans ce climat échauffant et irritant. La grande quantité de lard et de graisse, le pain chaud, la manière dont les mets sont épicés, les conserves, les plats d’huîtres le soir, tout cela est nuisible. Il faut y ajouter les « furnaces, » sortes de tuyaux qui servent à faire pénétrer l’air chaud dans les appartements, au moyen de trous faits au plancher ou dans le mur, et qui réchauffent une pièce en cinq ou six minutes ; mais ils y répandent une chaleur ardente, épaisse, malsaine, qui me fait toujours éprouver un sentiment d’angoisse et me donne des bourdonnements dans la tête. Les petits poêles en fer, dont on se sert souvent aussi, ne sont pas bons, leur chaleur est trop vive, agaçante, quoique infiniment meilleure que celle des « furnaces. » Ceux-ci, j’en suis sûre, sont un peu parents de la fournaise de l’enfer, et me semblent destinés à détruire les nerfs et les poumons humains. En ajoutant à ceci la chaleur provoquée par l’éclairage au gaz des salons, l’âpreté de l’air et son instabilité hors des maisons, il sera facile d’expliquer pourquoi les femmes surtout, qui sont loin d’être pruden-

  1. Le dieu de la force dans la mythologie scandinave. (Trad.)