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Page:Bremer - La Vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 1.djvu/266

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LA VIE DE FAMILLE

lui avoir caché. L’espèce de pouvoir magnétique que cette femme, qui n’est pas femme en beaucoup de choses, exerce sur les hommes est remarquable. Quant à moi, je suis — comme le dit une de ses amies — fort contente qu’il y ait une Fanny Kemble au monde, mais peu désireuse qu’il y en ait deux.

La dernière grande soirée que j’ai passée à Boston a été chez le maire, M. Quincy ; il appartient à l’une des plus anciennes familles du Massachusett. Les jours qui précédèrent mon départ furent laborieux, et le dernier surtout, où j’eus des paquets à disposer, plusieurs lettres à écrire, des visites à faire, à recevoir jusqu’au dernier moment, me replongea dans ma misère et mon état fébrile. Mais, quand cette dernière journée, avec ses diverses scènes, son labour et tout ce qu’elle offrit de curieux, fut achevée, et avec elle une partie — assez lourde — de ma vie dans le Nouveau-Monde ; lorsque, dans la soirée, je me fis lire par le jeune Vickers quelques chapitres de l’Évangile de saint Jean, alors je me trouvai bien et délicieusement ; et si la source de mes larmes jaillit, ce fut surtout de reconnaissance ; car… ce temps de maladie et d’abattement n’était-il point passé ?

Ce dernier soir m’a produit l’effet d’un suave message de paix après ce temps et cette journée agités.

Je suis partie de Boston le dernier jour de février à huit heures du matin, et j’étais levée depuis cinq heures. M. King et M. Vickers me conduisirent à la station du chemin de fer, où je trouvai le bon docteur et le professeur How, qui me donna un gros et joli bouquet. C’est en le tenant à la main que je partis dans une voiture commode emportée sur les ailes de la vapeur, par un soleil étincelant, une matinée froide, et, contre mon attente, lé-