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Page:Bremer - La Vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 1.djvu/286

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LA VIE DE FAMILLE

été cordial et rayonnant, m’a fait cadeau d’un volume de Wordsworth, « l’Excursion, » et a été complétement aimable et bon. Avec de tels gens, on respire l’air du printemps. Le soir, il y a eu ici quelques personnes, et Channing étant parti après nous avoir dit adieu, rentra tout à coup, me pria de sortir, me conduisit sur la terrasse, me montra le firmament étendu au-dessus de nos têtes avec splendeur, sourit, serra ma main — et disparut.

Mais, au lieu de t’occuper toujours de moi et de ce qui m’intéresse, je devrais te parler un peu de la chose publique. Un intérêt général, stimulant, domine maintenant ce pays : la question de l’esclavage a repris une nouvelle vie par celle de l’annexion de la Californie et du Texas aux États-Unis comme États indépendants. On peut dire que le pays entier est partagé en partisans de l’esclavage et en abolitionistes. La Californie, peuplée rapidement, surtout de gens venus des États du Nord-Est, des fils entreprenants de pèlerins, s’est présentée au Congrès, en lui demandant d’être délivrée de l’esclavage et reconnue comme État libre. Les États à esclaves du Sud ne veulent pas y consentir, parce que la Californie devant, par sa position géographique, en faire partie, son émancipation, sous le rapport de l’esclavage, diminuerait leur influence dans le Congrès. Les États du Sud combattent donc en désespérés pour ce qu’ils appellent leurs droits ; les États du Nord, délivrés de l’esclavage, luttent avec la même ardeur pour empêcher l’esclavage de s’étendre à la Californie et au Texas, et pour parvenir à déraciner ce qu’ils considèrent avec raison comme un malheur et une honte pour leur patrie. La lutte se poursuit avec une égale amertume des deux côtés, au dehors et dans le Congrès. Il y a ici des abolitionistes de toutes les nuances. Plusieurs de mes connaissances font