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Page:Bremer - La Vie de famille dans le Nouveau-Monde vol 1.djvu/316

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LA VIE DE FAMILLE

de brillants cardinaux (ainsi appelés à cause de leur beau plumage rouge), viennent familièrement piqueter les grains de riz qu’elle leur jette sur la terrasse.

De temps à autre on voit glisser sur la paisible Péedée un petit canot portant un nègre. C’est seulement en apercevant les bateaux à vapeur qui de temps à autre laissent échapper une traînée de fumée sur le Waccamaw, au delà du Péedée, et les voiles qui glissent en le descendant pour aller à Cuba ou en Chine, qu’on s’aperçoit qu’ici également on vit dans un monde commerçant et actif.

M. Poinsett est un gentilhomme pour les manières et l’extérieur (il descend d’une famille française), et joint à la délicatesse et à la courtoisie de cette nation la simplicité et la droiture vraies qui me plaisent tant chez l’Américain véritable, chez l’homme du Nouveau-Monde. Il a beaucoup vu, a été de beaucoup de choses, de sorte qu’il y a plaisir réel à causer avec lui, surtout des rapports politiques intérieurs des États-Unis qu’il a contribué à former, pour l’esprit et le but desquels il a une grande intelligence, et un cœur de citoyen plein de chaleur. Durant les conversations que j’ai eues avec lui le soir après le thé, j’en ai plus appris à cet égard que je n’aurais pu le faire dans les livres, parce qu’avec M. Poinsett je puis faire des questions et des objections auxquelles il répond. C’est le premier homme, à une exception près, que j’aie trouvé dans le Sud parlant de l’esclavage avec franchise et impartialité. Il désire sérieusement que sa patrie soit délivrée de cette chaîne et croit qu’on y parviendra ; mais les rapports actuels lui semblent tellement embrouillés, et les difficultés pour opérer un changement si grandes, qu’il abandonne la solution de cette affaire à l’avenir. Il croit à la marche en avant de l’Amérique, sans être satisfait de beaucoup de