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Page:Broglie - Souvenirs, 1785-1817.djvu/234

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coup d’aiguillon ; de l’autre, le dirai-je ? il ne voyait guère de chance de paix, si petite qu’elle fût, que dans la route qu’il suivait sans l’avoir choisie. Qui sait si l’empereur, lorsqu’il se trouverait placé entre des conditions raisonnables, plus que raisonnables, et la crainte d’avoir sur les bras deux cent mille hommes de plus, n’hésiterait pas ? s’il ne lui monterait en tête un grain de bon sens, un éclair de sagesse ?

Quant à M. de Metternich, il connaissait bien l’empereur et s’attendait à tout ; il connaissait bien sa position et se tenait prêt à tout risquer ; mais, décidé à jouer le tout pour le tout, il ne voulait agir que sous le coup de la nécessité, après avoir tout épuisé pour y échapper, après avoir offert au gendre de son maître des conditions qu’il fût odieux et insensé de refuser ; en tout cas, il entendait n’agir que de son chef, librement, et sans se laisser traîner à la remorque des passions qui l’assiégeaient au dedans comme au dehors de son pays.

Dans une situation aussi compliquée, où chacun jouait, en quelque sorte, double jeu ; où chacun poursuivait deux buts, l’un à défaut de l’autre, on comprend comment chacun se trouvait en chair