Aller au contenu

Page:Broglie - Souvenirs, 1785-1817.djvu/276

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Les dispositions que j’y portais étaient de bon aloi. Mes sentiments étaient sains, mes intentions droites, mes opinions sensées. Sans mépriser ni dénigrer l’ancien régime, toute tentative de le remettre sur pied me paraissait puérile. J’appartenais de cœur et de conviction à la société nouvelle, je croyais très sincèrement à ses progrès indéfinis ; tout en détestant l’état révolutionnaire, les désordres qu’il entraîne et les crimes qui le souillent, je regardais la Révolution française prise in globo comme une crise inévitable et salutaire. En politique, je regardais le gouvernement des États-Unis comme l’avenir des nations civilisées, et la monarchie anglaise comme le gouvernement du temps présent ; je haïssais le despotisme et ne voyais dans la monarchie administrative qu’un état de transition. Il y avait en tout cela sans doute beaucoup de jeunesse, un peu de rêverie, mais rien qui fût radicalement faux, rien qui ne pût être rectifié par le temps et la réflexion, rien qui ne fût compatible avec une conduite loyale et régulière.

J’avais employé les loisirs où me laissait l’agonie du régime impérial à traiter par écrit diverses questions politiques. Je trouve à la fin d’un de ces