Page:Brontë - Un amant.djvu/46

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Je m’imaginai pour un instant que cette pièce d’éloquence s’adressait à moi, et ma rage étant arrivée à son comble, je marchai vers le vieux gredin avec l’intention de le lancer dehors, mais Madame Heathcliff m’arrêta par sa réponse.

— Scandaleux vieil hypocrite, répliqua-t-elle, n’avez-vous pas peur de voir vous-même votre corps emporté par le diable toutes les fois que vous mentionnez son nom ? Je vous avertis de cesser de me provoquer ou bien je demanderai votre enlèvement à Satan comme une faveur particulière.

Joseph effrayé se hâta de sortir.

Maintenant nous étions seuls ; j’essayai d’intéresser la belle jeune femme à ma détresse.

— Madame Heathcliff, lui dis-je avec chaleur, je pense que vous m’excuserez de vous déranger, car avec votre figure, je suis sûr que vous ne pouvez pas ne pas avoir bon cœur. Indiquez-moi quelques signes, qui puissent me faire reconnaître mon chemin pour rentrer chez moi : je n’ai pas plus d’idée pour savoir comment je pourrai y rentrer que vous n’en auriez sur la façon d’aller à Londres.

— Prenez le chemin par où vous êtes venu, répondit-elle, se cachant dans un fauteuil, avec une chandelle à côté, et un livre ouvert devant elle. C’est un conseil sommaire, mais le meilleur que je puisse vous donner.

— Alors, il s’ensuit que je suis forcé de rester ici ?

— C’est une affaire que vous pourrez arranger avec votre hôte, je n’ai rien à y voir.

— J’espère que cela vous apprendra à ne plus faire d’aussi imprudentes promenades sur ces collines ! cria, de l’entrée de la cuisine, la dure voix de Heathcliff. Pour ce qui est de rester ici, je ne tiens pas d’installation pour les visiteurs ; il faudra, si vous voulez rester, que vous partagiez le lit de Hareton ou celui de Joseph.