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Page:Brossard - Correcteur typographe, 1924.djvu/142

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LE CORRECTEUR TYPOGRAPHE

surtout — commence par négliger la formation, ou littéraire ou technique, de ces collaborateurs et finit par oublier d’apprécier et, dès lors, de récompenser comme ils le méritent et leurs connaissances et leurs services.

On s’étonnera peut-être de nous voir dire ici ; le prote ne doit point négliger « la formation littéraire » de ces collaborateurs [les typographes promus correcteurs]. Le fait n’a pourtant rien qui puisse surprendre… Nous sommes de ceux qui pensent et qui affirment que « le prote ne saurait avoir des connaissances trop étendues dans les lettres, les sciences et les arts, car il est souvent consulté par les auteurs et devient même leur arbitre[1] ». Bien que ces lignes aient été écrites il y a près d’un siècle et demi, elles n’ont rien perdu de leur actualité et de leur nécessité : le prote doit posséder pour lui-même, ou « il a trois instructions [personnelles] à acquérir en même temps : l’instruction technique, l’instruction grammaticale et l’instruction commerciale[2] ». Ayant une « instruction grammaticale », le prote doit s’assurer que le typographe devenu correcteur possède cette même instruction ; ou, au cas contraire, l’obliger ou lui donner les moyens de l’acquérir.

Si sur ce point quelques protes — dont le nombre sera fort rare heureusement — estiment n’être point d’accord avec nos sentiments, il en est un autre sur lequel ils se sépareront encore de nous ; nous nous élevons avec force contre ceux qui malhonnêtement prétendent considérer le correcteur érudit comme un arriviste adversaire du prote. « Plus l’instruction du prote sera faible, moins l’Imprimerie reviendra aux imprimeurs… L’instruction négligée du prote crée des proteries à deux tronçons. Le plus souvent un étudiant en mal de bachot, absolument indifférent à l’imprimerie, mais surtout arriviste, se greffe sur l’emploi comme le gui sur le chêne. Alors on paye le prote selon sa stricte valeur[3] ; alors, nos imprimeries s’emplissent petit à petit d’hérétiques à la profession — instruits, personne ne le conteste — qui bientôt jouiront d’une situation prépondérante là où le prote n’a su que garder le collier. À qui la faute ? Comme nous serions forts[4]

  1. Audouin de Géronval.
  2. Ch. Ifan, le Prote, p. 22.
  3. Le cas est plutôt rare d’un patron payant ses employés au delà de leur valeur.
  4. Que signifie exactement ce mot ? À quoi fait ainsi allusion Ch. Ifan ? — Il serait