Aller au contenu

Page:Brossard - Correcteur typographe, 1924.djvu/258

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

gréable que cet emploi irraisonné de caractères de familles disparates dont maints compositeurs ignorants ont la regrettable spécialité. Style ancien, style moderne, — style gothique, style Empire, — style roman, style Renaissance, autant de choses qui pour ces typographes sont tout au plus des mots ; leur instruction technique n’a pas été au delà des limites que l’éditeur Pelletan posait à la beauté d’un livre, lorsqu’il écrivait : « Un livre est du noir sur du blanc. » Trop souvent alors, si le correcteur manque de bon sens et de bon goût, « le livre sera du noir sur du blanc », et pas autre chose.


F. — Le correcteur et ses… erreurs


Il faut que le correcteur sache se méfier de ses lumières.

Le correcteur n’est point un parasite que le compositeur doit traîner à sa remorque ; tout au contraire, sa situation doit faire et fait de lui, au point de vue littéraire comme au point de vue typographique, un guide. La délicatesse et les responsabilités de cet emploi ne sauraient lui échapper.

Malgré son érudition certaine, des erreurs grossières peuvent tromper son attention : le correcteur ne l’ignore point. Mais, loin de le décourager, la constatation qu’il fait de ces erreurs doit développer sa vigilance et sa sagacité et lui montrer la nécessité de ne dédaigner aucun des moyens susceptibles de le garantir de ces accidents du travail contre lesquels n’existe pas d’assurance et qui souvent entraînent de sérieux désagréments. L’infaillibilité ne fut jamais son apanage, et, d’ailleurs, en aucun temps il n’eut la prétention de tout connaître. Ses efforts tendent uniquement à se rapprocher le plus possible de la perfection. Il ne saurait se vanter de l’avoir souvent atteinte. Aux yeux des personnes de bon sens une telle affirmation serait simplement ridicule, et à vouloir la soutenir il ne tarderait pas à semer autour de lui la méfiance et à devenir suspect.

Nos ancêtres n’avaient pas crainte d’avouer leurs défaillances possibles. Dans l’Avant-Propos d’un ancien Coutumier imprimé à Sens, au xvie siècle, l’imprimeur Gilles Richeboys écrit, sans fausse