CHAPITRE XXXIII
MACHINES À COMPOSER
Le problème de la composition mécanique a préoccupé longtemps les inventeurs, et des projets parfois étranges ont vu le jour à côté des réalisations sensées qui ont permis d’atteindre le but.
D’après quelques auteurs, la première composeuse mécanique — résultat des recherchés d’un nommé William Church — aurait été construite en 1822.
Elle fut suivie de nombre d’autres, dont l’énumération complète ne paraît pas utile au sujet actuel ; cette énumération serait, d’ailleurs fort longue et certes superflue, car plusieurs des conceptions imaginées restèrent à l’état de projet.
Il suffira de rappeler que, vers l’année 1840, MM. Young et Delcambre construisirent un clavier mécanique destiné à la composition.
Cette machine fort ingénieuse, et pour laquelle ses auteurs obtinrent une médaille à l’Exposition
de 1844, fonctionna quelque temps dans des imprimeries à Paris, mais dut être rapidement abandonnée.
En 1855, le Danois Sürensen montrait à l’Exposition universelle une machine qui composait et distribuait.
Cette invention, fruit de dix-sept années d’étude, fut particulièrement remarquée, et le Jury international lui décerna une haute récompense ; mais son application parut sujette à de si nombreux
inconvénients de détail que ses avantages en furent pour ainsi dire neutralisés.
En 1867, un Américain, Charles Moore, présentait une machine à imprimer
construite sur le principe suivant : autour d’un cylindre tournant sur son axe étaient disposés des caractères typographiques ; grâce au jeu des touches d’un clavier, ces caractères s’imprimaient sur une bande de papier entraînée mécaniquement.
Les fragments de cette dernière, découpée après chaque mot, étaient d’abord juxtaposés de manière à former des lignes convenablement espacées et justifiées, puis reportés sur une pierre lithographique afin de former les pages et d’en permettre le tirage.
Comme les précédentes, la machine de Charles Moore dut être abandonnée : ainsi que ses devancières elle n’avait pu surmonter les deux principales difficultés auxquelles s’étaient heurtés, dès le début de leurs travaux, tous les
inventeurs : justification et distribution.
Les problèmes posés par ces questions furent d’ailleurs fort longtemps considérés comme presque insolubles ; et même après des tentatives qui paraissaient cependant devoir donner des résultats
tangibles — aux dernières années du xixe siècle — un auteur typographique mal informé n’hésitait pas à écrire :