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Page:Brunet - Les hypocrites (1) - La folle expérience de Philippe, 1945.pdf/118

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DE PHILIPPE

allusion. Quand le hasard lui avait mis dans les mains cette serviette, un diable le poussait comme toujours à s’accuser cyniquement. Il voulait aussi que Lucien, qu’il avait vu regarder les initiales ne devinât rien et, paradoxalement, comme toujours, il donnait des indices, il se mettait les pieds dans les plats. Souvent, c’est parce qu’il était étourdi et maladroit que Philippe paraissait tellement cynique : en vérité son cynisme ne mettait jamais que le dernier paraphe livresque et littéraire à sa gaucherie.

— Tu ne devrais pas voir des gens comme Pierre, qui te font boire et qui te mettront dans des embarras… Mais je suis pressé…

— Je t’accompagne un bout…

— Il faudra que tu marches vite, j’ai à peine le temps.

Philippe s’accrochait. Il comptait s’expliquer : « Je n’ai pas besoin des autres pour boire ou me dôper… » Philippe était jaloux même de cette indépendance, et, si lui-même, dans ses discours, rendait les autres responsables, il n’acceptait jamais que ses compagnons lui enlèvent l’initiative de ses actions, il n’acceptait pas cette excuse dans la bouche des autres, il la réservait à ses tirades. « Et puis Pierre a des raisons de boire. Ce n’est pas sa faute si le monde est si mal fait, qu’il ne nous offre pas d’autre évasion. Pour moi, c’est autre chose encore : je ne crois qu’au moment présent, et je