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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome I, partie 2.pdf/149

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rangement naturel de la terre, etc. ; mais c’est trop espérer, et sur des fondements trop légers, et je pense qu’il faut nous borner à croire qu’on y trouvera des coquilles, comme on en trouve partout ailleurs.

À l’égard de la manière dont ces coquilles sont disposées et placées dans les couches de terre ou de pierre, voici ce qu’en dit Woodward. « Tous les coquillages qui se trouvent dans une infinité de couches de terres et de bancs de rochers, sur les plus hautes montagnes et dans les carrières et les mines les plus profondes, dans les cailloux de cornaline, de calcédoine, etc., et dans les masses de soufre, de marcassites et d’autres matières minérales et métalliques, sont remplis de la matière même qui forme les bancs ou les couches, ou les masses qui les renferment, et jamais d’aucune matière hétérogène. » (Page 206 et ailleurs.) « La pesanteur spécifique des différentes espèces de sables ne diffère que très peu, étant généralement, par rapport à l’eau, comme 2 4/9 ou 2 9/16 à 1, et les coquilles de pétoncle, qui sont à peu près de la même pesanteur, s’y trouvent ordinairement renfermées en grand nombre, tandis qu’on a de la peine à y trouver des écailles d’huîtres, dont la pesanteur spécifique n’est environ que comme 2 1/3 à 1, de hérissons de mer dont la pesanteur n’est que comme 2 ou 2 1/3 à 1, ou d’autres espèces de coquilles plus légères ; mais, au contraire, dans la craie qui est plus légère que la pierre, n’étant à la pesanteur de l’eau que comme environ 2 1/10 à 1, on ne trouve que des coquilles de hérissons de mer et d’autres espèces de coquilles plus légères. » (Voyez p. 17 et 18.)

Il faut observer que ce que dit ici Woodward ne doit pas être regardé comme règle générale ; car on trouve des coquilles plus légères et plus pesantes dans les mêmes matières, par exemple des pétoncles, des huîtres et des oursins dans les mêmes pierres et dans les mêmes terres, et même on peut voir au cabinet du Roi un pétoncle pétrifié en cornaline et des oursins pétrifiés en agate ; ainsi, la différence de la pesanteur spécifique des coquilles n’a pas influé, autant que le prétend Woodward, sur le lieu de leur position dans les couches de terre ; et la vraie raison pourquoi les coquilles d’oursins et d’autres aussi légères se trouvent plus abondamment dans les craies, c’est que la craie n’est qu’un détriment de coquilles, et que celles des oursins étant plus légères, moins épaisses et plus friables que les autres, elles auront été aisément réduites en poussière et en craie, en sorte qu’il ne se trouve des couches de craie que dans les endroits où il y avait anciennement sous les eaux de la mer une grande abondance de ces coquilles légères, dont les débris ont formé la craie dans laquelle nous trouvons celles qui, ayant résisté au choc et aux frottements, se sont conservées tout entières, ou du moins en parties assez grandes pour que nous puissions les reconnaître.

Nous traiterons ceci plus à fond dans notre discours sur les minéraux ; contentons-nous seulement d’avertir ici qu’il faut encore donner une modification aux expressions de Woodward : il paraît dire qu’on trouve des coquilles dans les cailloux, dans les cornalines, dans les calcédoines, dans les masses de soufre, aussi souvent et en aussi grand nombre que dans les autres matières, au lieu que la vérité est qu’elles sont très rares dans toutes les matières vitrifiables ou purement inflammables, et qu’au contraire elles sont en prodigieuse abondance dans les craies, dans les marnes, dans les marbres et dans les pierres, en sorte que nous ne prétendons pas dire ici qu’absolument les coquilles les plus légères sont dans les matières légères, et les plus pesantes dans celles qui sont aussi les plus pesantes, mais seulement qu’en général cela se trouve plus souvent ainsi qu’autrement. À la vérité, elles sont toutes également remplies de la substance même qui les environne, aussi bien celles qu’on trouve dans les couches horizontales que celles qu’on trouve en plus petit nombre dans les matières qui occupent les fentes perpendiculaires, parce qu’en effet les unes et les autres ont été également formées par les eaux ; quoique en différents temps et de différentes façons, les couches horizontales de pierre, de marbre, etc., ayant