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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome II, partie 3.pdf/182

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en fait depuis tant de siècles[1]. Et en effet le fer pourra bien devenir moins commun dans la suite des temps, car la quantité qui s’en reproduit dans la terre végétale ne peut pas, à beaucoup près, compenser la consommation qui s’en fait chaque jour.

On observe, dans ces mines de fer, que les grains sont tous ronds ou un peu oblongs, que leur grosseur est la même dans chaque mine, et que cependant cette grosseur varie beaucoup d’une minière à une autre : cette différence dépend de l’épaisseur de la couche de terre végétale où ces grains de fer se sont anciennement formés, car on voit que plus l’épaisseur de la terre est grande, plus les grains de mine de fer qui s’y forment sont gros, quoique toujours assez petits.

Nous remarquerons aussi que ces terres dans lesquelles se forment les grains de la mine de fer paraissent être de la même nature que les autres terres limoneuses où cette formation n’a pas lieu ; les unes et les autres sont d’abord, dans leurs premières couches, noirâtres, arides et sans cohésion, mais leur couleur noire se change en brun dans les couches inférieures et ensuite en un jaune foncé ; la substance de cette terre devient ductile ; elle s’imbibe facilement d’eau et s’attache à la langue. Toutes les propriétés de ces terres limoneuses et ferrugineuses sont les mêmes, et la mine de fer en

  1. « On peut se faire une idée de la quantité de mines de fer qu’on tire de la terre, dans le seul royaume de France, par le calcul suivant :
    » Les mines
    de Dauphiné 40 livres
    de fonte pour cent livres de mine.
    de Bretagne 43
    de Bourgogne 30
    de Champagne 33
    de Normandie 30
    de Franche-Comté 36
    de Berry 34

    » Ce produit est le terme moyen dans chacune de ces provinces : la variété générale est de 16 à 50 pour cent.

    » L’on peut regarder, pour terme moyen du produit des mines de France, 33 pour cent, qui est aussi le plus général.

    » Le poids commun des mines lavées et préparées pour être fondues est de 115 livres le pied cube.

    » Il faut, sur ce pied, 22 1/2 pieds cubes de mine pour produire un mille de fonte, qui rend communément 667 livres de fer forgé.

    » Il y a en France environ cinq cents fourneaux de fonderie qui produisent annuellement 300 millions de fonte, dont 1/6 passe dans le commerce en fonte moulée ; les 5/6 restants sont convertis en fer, et en produisent 168 millions, qui est le produit annuel, à peu de chose près, de la fabrication des forges françaises.

    » 300 millions de fonte, à raison de 22 1/2 pieds cubes de minerai par mille, donnent 7 millions 950 000 pieds cubes de minerai, équivalant à 36 805 toises 120 pieds cubes.

    » Or, comme le minerai de fer, surtout celui qui se retire de minières formées par alluvion, telles que sont celles de la majeure partie de nos provinces, est mélangé de terre, de sable, de pierres et de coquilles fossiles, qui sont des matières étrangères que l’on en sépare par le lavage ; que ces matières excèdent deux, trois, et souvent quatre fois le volume du minerai, qui en est séparé par le lavage, le crible et l’égrappoir, on peut donc tripler la masse générale du minerai extrait annuellement en France des minières, et la porter à 110 416 toises cubes, qui est le total de l’extraction annuelle des mines, non compris les déblais qui les recouvrent. » Note communiquée par M. de Grignon.

    En prenant 1 pied d’épaisseur pour mesure moyenne des mines en grains que l’on exploite en France, on a remué pour cela 662 496 toises d’étendue sur 1 pied d’épaisseur, ce qui fait 736 arpents de 900 toises chacun, et 96 toises de plus de terrain qu’on épuise de minerai chaque année, et pendant un siècle 73 160 arpents.