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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome II, partie 3.pdf/189

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puis en donner d’avance, en attendant les preuves plus particulières que je réserve pour l’article où je traiterai de cette brillante production de la terre. On sait que les diamants, ainsi que plusieurs autres pierres précieuses, ne se trouvent que dans les climats du Midi, et qu’on n’a jamais trouvé de diamants dans le Nord, ni même dans les terres des zones tempérées ; leur formation dépend donc évidemment de l’influence du soleil sur les premières couches de la terre, car la chaleur propre du globe est à très peu près la même à une petite profondeur dans tous les climats froids ou chauds : ainsi, ce ne peut être que par cette plus grande influence du soleil sur les terres des climats méridionaux que le diamant s’y forme à l’exclusion de tous les autres climats ; et comme cette influence agit principalement sur la couche la plus extérieure du globe, c’est-à-dire sur celle de la terre végétale, et qu’elle n’a nulle action sur les couches intérieures, on ne peut attribuer qu’à cette même terre végétale la formation du diamant et des autres pierres précieuses qui ne se trouvent que dans les contrées du Midi ; d’ailleurs l’inspection nous a démontré que la gangue du diamant est une terre rouge semblable à la terre limoneuse. Ces considérations seules suffiraient pour prouver en général que tous les minéraux qui ne se trouvent que sous les climats les plus chauds, et le diamant en particulier, ne sont formés que par les éléments contenus dans la terre végétale[NdÉ 1] et combinés avec la lumière et la chaleur que le soleil y verse en plus grande quantité que partout ailleurs.

Nous avons dit qu’il n’y a rien de combustible dans la nature que ce qui provient des êtres organisés ; nous pouvons avancer de même qu’il n’y a rien de régulièrement figuré dans la matière que ce qui a été travaillé par les molécules organiques, soit avant, soit après la naissance de ces mêmes êtres organisés : c’est par la grande quantité de ces molécules organiques contenues dans la terre végétale que se fait la production de tous les végétaux et l’entretien des animaux ; leur développement, leur accroissement ne s’opèrent que par la susception de ces mêmes molécules qui pénètrent aisément toutes les substances ductiles ; mais lorsque ces molécules actives ne rencontrent que des matières dures et trop résistantes, elles ne peuvent les pénétrer, et tracent seulement à leur superficie les premiers linéaments de l’organisation qui forment les traits de leur figuration.

Mais revenons à la terre végétale prise en masse, et considérée comme la première couche qui enveloppe le globe. Il n’y a que très peu d’endroits sur la terre qui ne soient pas couverts de cette terre : les sables brûlants de l’Afrique et de l’Arabie, les sommets nus des montagnes composées de quartz ou de granit, les régions polaires, telles que Spitzberg et Sandwich, sont les seules terres où la végétation ne peut exercer sa puissance, les seules qui soient dénuées de cette couche de terre végétale, qui fait la couverture et produit la parure du globe. « Les roches pelées et stériles de la terre de Sandwich, dit M. Forster, ne paraissent pas couvertes du moindre grain de terreau, et on n’y remarque aucune trace de végétation… Dans la baie de Possession, nous avons vu deux rochers où la nature commence son grand travail de la végétation[1] ; elle a déjà formé une légère enveloppe de sol au sommet des rochers, mais son ouvrage avance si lentement qu’il n’y a encore que deux plantes, un gramen et une espèce de pimprenelle… À la terre de Feu, vers l’ouest, et à la terre des États, dans les cavités et les crevasses des piles énormes de rochers qui composent ces terres, il se conserve un peu d’humidité, et le frottement continuel des morceaux de roc détachés, précipités le long des flancs de ces masses grossières, produit de petites particules d’une espèce de sable : là, dans une eau stagnante, croissent peu à peu quelques plantes du genre des algues, dont les graines y ont

  1. C’est plutôt que le travail de la nature expire sur ces extrémités polaires ensevelies déjà par les progrès du refroidissement, et qui sont à jamais perdues pour la nature vivante.
  1. Le diamant est du carbone pur. [Note de Wikisource : Tout le passage sur la formation du diamant est erroné. Voyez les notes à l’article du diamant.]