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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome II, partie 3.pdf/25

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si bizarres qu’on a grande peine à deviner leur origine et même à démêler leurs diverses substances.

L’ordre que nous mettrons dans la contemplation de ces différents objets, sera simple et déduit des principes que nous avons établis ; nous commencerons par la matière la plus brute, parce qu’elle fait le fond de toutes les autres matières, et même de toutes les substances plus ou moins organisées ; or, dans ces matières brutes, le verre primitif est celle qui s’offre la première comme la plus ancienne et comme produite par le feu dans le temps où la terre liquéfiée a pris sa consistance : cette masse immense de matière vitreuse, s’étant consolidée par le refroidissement, a formé des boursouflures et des aspérités à sa surface ; elle a laissé en se resserrant une infinité de vides et de fentes, surtout à l’extérieur, lesquelles se sont bientôt remplies par la sublimation ou la fusion de toutes les matières métalliques ; elle s’est durcie en roche solide à l’intérieur, comme une masse de verre bien recuit se consolide et se durcit lorsqu’il n’est point exposé à l’action de l’air. La surface de ce bloc immense s’est divisée, fêlée, fendillée, réduite en poudre par l’impression des agents extérieurs ; ces poudres de verre furent ensuite saisies, entraînées et déposées par les eaux, et formèrent dès lors les couches de sable vitreux qui, dans ces premiers temps, étaient bien plus épaisses et plus étendues qu’elles ne le sont aujourd’hui ; car une grande partie de ces débris de verre qui ont été transportés les premiers par le mouvement des eaux ont ensuite été réunis en blocs de grès, ou décomposés et convertis en argile par l’action et l’intermède de l’eau : ces argiles durcies par le dessèchement ont formé les ardoises et les schistes ; et ensuite les bancs calcaires produits par les coquillages, les madrépores et tous les détriments des productions de la mer, ont été déposés au-dessus des argiles et des schistes, et ce n’est qu’après l’établissement local de toutes ces grandes masses que se sont formés la plupart des autres minéraux.

Nous suivrons donc cet ordre, qui de tous est le plus naturel ; et, au lieu de commencer par les métaux les plus riches ou par les pierres précieuses, nous présenterons les matières les plus communes, et qui, quoique moins nobles en apparence, sont néanmoins les plus anciennes, et celles qui tiennent, sans comparaison, la plus grande place dans la nature, et méritent par conséquent d’autant plus d’être considérées que toutes les autres en tirent leur origine.