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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome II, partie 3.pdf/78

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tainebleau et ailleurs, qui affectaient une figure quadrangulaire et qui étaient pour ainsi dire cristallisés en rhombes ; or, cette espèce de cristallisation ou de figuration n’est pas une des propriétés du grès pur[1] ; c’est un effet accidentel qui n’est dû qu’au mélange de la matière calcaire avec celle du grès ; car ayant fait dissoudre par un acide ces morceaux figurés en rhombes, il s’est trouvé qu’ils contenaient au moins un tiers de substance calcaire sur deux tiers de vrai grès, et qu’aucun des grès, qui n’étaient que peu ou point mélangé de cette matière calcaire, n’a pris cette figure rhomboïdale.

Après avoir considéré les principales matières solides et dures qui se présentent en grandes masses dans le sein ou à la surface de la terre, et qui, comme nous venons de l’exposer, sont ou des verres primitifs ou des agrégats de leurs parties divisées et réduites en grains, nous devons examiner de même les matières en grandes masses qui en tirent leur origine et qui en sont les détriments ultérieurs, tels que les argiles, les schistes et les ardoises, qui ne diffèrent des sables vitreux que par une plus grande décomposition de leurs parties intégrantes, mais qui, pour le premier fonds de leur substance, sont de même nature.




DES ARGILES ET DES GLAISES

L’argile, comme nous venons de l’avancer, doit son origine à la décomposition des matières vitreuses, qui, par l’impression des éléments humides, se sont divisées, atténuées et réduites en terre. Cette vérité est démontrée par les faits : 1o Si l’on examine les cailloux les plus durs et les autres matières vitreuses exposées depuis longtemps à l’air, on verra que leur surface a blanchi, et que dans cette partie extérieure le caillou s’est ramolli et décomposé, tandis que l’intérieur a conservé sa dureté, sa sécheresse et sa couleur ; si l’on recueille cette matière blanche en la raclant, et qu’on la détrempe avec de l’eau, l’on verra que c’est une matière qui a déjà pris le caractère d’une terre spongieuse et ductile, et qui approche de la nature de l’argile ; 2o les laves des volcans et tous nos verres factices, de quelque qualité qu’ils soient, se convertissent en terre argileuse[2] ; nous voyons

  1. Une autre espèce de grès découvert depuis peu dans la forêt de Fontainebleau, du côté de la Belle-Croix, est composé d’un amas de vrais cristaux réguliers, de forme rhomboïdale… On trouve ce grès indiqué et décrit pour la première fois dans un catalogue imprimé (chez Claude Hérissant, et composé par M. Romé de Lille) d’un riche cabinet d’histoire naturelle, exposé en vente à Paris, dans le mois de juillet de cette année 1774 : dans une note relative à cette indication, on observe que cette espèce de grès n’est pas pure, que l’acide nitreux l’attaque à raison d’une substance calcaire qui entre dans sa mixtion en proportion d’un peu plus d’un tiers sur le total ; et l’on ajoute que peut-être la cristallisation de cette pierre sableuse n’a été déterminée que par le mélange et le concours de la matière qui paraît servir de ciment… Dans ce canton de la Belle-Croix, les blocs y sont moins isolés et paraissent former des chaînes ou des bancs plus réguliers. Mémoire sur les grès, par M. de Lassone, Académie des sciences, année 1774.
  2. « Une partie des laves de la Solfatare (près de Naples) est convertie en argile ; il y a des morceaux dont une partie est encore lave et l’autre partie est changée en argile… On y voit encore des schorls blancs en forme de grenat, dont quelques-uns sont également convertis en argile… Ce changement des matières vitreuses en argile, par l’intermède de l’acide sulfureux (ou vitriolique) qui les a pénétrées, en quelque façon dissoutes, est sans doute un phénomène remarquable et très intéressant pour l’histoire naturelle. » Lettres de M. Ferber sur la minéralogie, p. 259.

    M. Ferber ajoute qu’une partie de cette argile est molle comme une terre, et que l’autre