Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome III.djvu/136

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Le vitriol bleu, dont la base est le cuivre, se forme comme le vitriol de fer ; on ne le trouve que dans les mines secondaires où le cuivre est déjà décomposé, et dont les terres sont abreuvées d’une eau chargée d’acide vitriolique. Ce vitriol cuivreux se présente aussi en masses ou en stalactites, mais rarement cristallisées, et les cristaux sont plus souvent dodécaèdres qu’hexaèdres ou rhomboïdaux : on peut tirer ce vitriol des pyrites cuivreuses et des autres minerais de ce métal qui sont presque tous dans l’état pyriteux[1].

On peut aussi employer des débris ou rognures de cuivre avec l’alun pour faire ce vitriol ; on commence par jeter sur ces morceaux de cuivre du soufre pulvérisé ; on les met ensemble dans un four, et on les plonge ensuite dans une eau où l’on a fait dissoudre de l’alun : l’acide de l’alun ronge et détruit les morceaux de cuivre ; on transvase cette eau dans des baquets de plomb lorsqu’elle est suffisamment chargée, et en la faisant évaporer on obtient le vitriol qui se forme en beaux cristaux bleus[2] ; c’est de cette apparence cristalline ou vitreuse que le non même de vitriol est dérivé[3].

Le vitriol de zinc est blanc, et se trouve aussi en masses et en stalactites dans les minières de pierre calaminaire ou dans les blendes ; il ne se présente que très rarement en cristaux à facettes ; sa cristallisation la plus ordinaire dans le sein de la terre est en filets soyeux et blancs[4].

  1. On ne peut tirer le vitriol bleu que de la véritable mine de cuivre ou de la matte crue qui en provient : plus la mine de cuivre est pure, plus elle contient de cuivre, plus le vitriol est d’un beau bleu ; cependant il y a moins de bénéfice à convertir le cuivre en vitriol que de le convertir en métal, attendu qu’on ne le tire pas tout d’une mine par la lessive, et qu’il en coûterait beaucoup trop pour retirer ce reste de cuivre par la fonte.

    Lorsqu’on veut faire du vitriol bleu d’une mine de cuivre, il faut la griller ou griller sa matte… On met cette mine toute chaude dans des cuves qu’on ne remplit qu’à moitié ; ou bien, si on l’a laissé refroidir après le grillage, il faut que l’eau qu’on verse dessus soit bouillante, ce qui est encore mieux, surtout dans les endroits où, comme à Goslar, il y a dans l’atelier une chaudière exprès pour faire chauffer l’eau : la lessive du vitriol bleu se fait comme celle du vitriol vert ; et si pendant vingt-quatre heures elle ne s’enrichit pas assez et ne contient pas au moins dix onces de vitriol, on peut la laisser séjourner pendant quarante-huit heures, ou bien verser cette lessive sur d’autre mine calcinée, afin d’en faire une lessive double : après que la lessive a séjourné le temps nécessaire sur la mine, on la transporte dans d’autres cuves pour qu’elle puisse s’y clarifier ; ensuite on tire la mine qui a été lessivée et on la grille de nouveau, ou pour la fondre, ou pour en faire une seconde lessive.

    Les eaux mères qui restent après la cristallisation du vitriol se remettent dans la chaudière avec de la lessive neuve, comme dans la fabrication du vitriol vert : on verse dans une cuve à rafraîchir les lessives cuites, et après qu’elles y ont déposé leur limon, on les transvase dans des cuves à cristalliser, et l’on y suspend des roseaux ou des échalas de bois, après lesquels le vitriol se cristallise. Traité de la fonte des mines de Schlutter, t. II, p. 638 et 639.

  2. Pline a parfaitement connu cette formation des cristaux du vitriol, et même il en décrit le procédé mécanique avec autant d’élégance que de clarté : « Fit in Hispaniæ puteis, dit-il, id genus aquæ habentibus… decoquitur… et in piscinas ligneas funditur, immobilibus super has transtris dependet restes, quibus adhærescens limus, vitreis acinis imaginem quamdam uvæ reddit ; color cæruleus perquam spectabili nitore, vitrumque creditur. » Histoire naturelle, liv. xxxiv, ch. xii.
  3. Les Grecs, qui apparemment connaissaient mieux le vitriol de cuivre que celui de fer, avaient donné à ce sel un nom qui désignait son affinité avec ce premier métal ; c’est la remarque de Pline : « Græci cognationem æris nomina fecerunt… appellantes chalcantum. » Lib. xxxiv, cap. xii.
  4. La base du vitriol blanc est le zinc : on l’a souvent nommé vitriol de Goslard, parce qu’on le tire des mines de plomb et d’argent de Rammelsberg, près de Goslard ; on leur