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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome III.djvu/155

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affinité avec l’eau, et que même il attire l’humidité de l’air, il n’est pas étonnant que, ne pouvant être condensé que par une forte chaleur, il ne se trouve jamais sous une forme sèche et solide dans le sein de la terre.

Dans les eaux qui découlent des collines calcaires, et qui se rassemblent sur la glaise qui leur sert de base, l’acide vitriolique de la glaise se trouve combiné avec la terre calcaire ; ces eaux contiennent donc de la sélénite en plus ou moins grande quantité, et c’est de là que vient la crudité de presque toutes les eaux de puits ; la sélénite dont elles sont imprégnées leur donne une sorte de sécheresse dure qui les empêche de se mêler au savon et de pénétrer les pois et autres graines que l’on veut faire cuire : si l’eau a filtré profondément dans l’épaisseur de la glaise, la saveur de l’acide vitriolique y devient plus sensible, et dans les lieux qui recèlent des feux souterrains, ces eaux deviennent sulfureuses par leur mélange avec l’acide sulfureux volatil, etc.

L’acide aérien et primitif, en se combinant avec la terre calcaire, a produit l’acide marin, qui est moins fixe et moins puissant que le vitriolique, et auquel cet acide aérien a communiqué une partie de sa volatilité : nous exposerons les propriétés particulières de cet acide dans les articles suivants.




ACIDES DES VÉGÉTAUX ET DES ANIMAUX

La formation des acides végétaux et animaux par l’acide aérien[NdÉ 1] est encore plus immédiate et plus directe que celle des acides minéraux, parce que cet acide primitif a pénétré tous les corps organisés, et qu’il y réside sous sa forme propre et en grande quantité[NdÉ 2].

Si l’on voulait compter les acides végétaux par la différence de leur saveur, il y en aurait autant que de plantes et de fruits, dont le goût agréable ou répugnant est varié presque à l’infini ; ces végétaux plus ou moins fermentés présenteraient encore d’autres acides plus développés et plus actifs que les premiers ; mais tous proviennent également de l’acide aérien.

Les acides végétaux que les chimistes ont le mieux examinés sont ceux du vinaigre et du tartre, et ils n’ont fait que peu d’attention aux acides des végétaux non fermentés. Tous les vins, et en particulier celui du raisin, se font par une première fermentation de la liqueur des fruits, et cette première fermentation leur ôte la saveur sucrée qu’ils ont naturellement ; ces liqueurs vineuses, exposées à l’air, c’est-à-dire à l’action de l’acide aérien, l’absorbent et s’aigrissent : l’acide primitif est donc également la cause de ces deux fermentations, il se dégage dans la première, et se laisse absorber dans la seconde. Le vinaigre n’est formé que par l’union de cet acide aérien avec le vin, et il conserve seulement une petite quantité d’huile inflammable ou d’esprit-de-vin qui le rend spiritueux ; aussi s’évapore-t-il à l’air, et il n’en attire pas l’humidité comme les acides minéraux ; d’ailleurs, il est mêlé, comme le vin, de beaucoup d’eau, et le moyen le plus sûr et le plus facile de concentrer le vinaigre est de l’exposer à une forte gelée ; l’eau qu’il contient se glace, et ce qui reste est un vinaigre très fort, dans lequel l’acide est concentré ; mais il faut s’attendre à ne tirer que cinq pour cent d’un vinaigre qu’on fait ainsi geler, et ce vinaigre, concentré par la gelée, est plus sujet à s’altérer que l’autre, parce que le froid, qui lui a

  1. Acide carbonique. Buffon lui fait jouer un rôle de la plus haute importance et surtout bizarre.
  2. Tout ce chapitre n’a d’autre intérêt que les notions qu’il fournit à l’histoire de la chimie. Je considère comme inutile d’en relever toutes les erreurs.