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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome III.djvu/19

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loppent de tous côtés et en tous lieux les veines de charbon, sont eux-mêmes des argiles durcies et qui ne laissent pas d’être combustibles : à cela je réponds que la méprise est ici la même ; ces schistes combustibles qui accompagnent la veine du charbon sont, comme l’on voit, mêlés de la substance des végétaux dont ils portent les impressions ; la même matière végétale qui a fait le fond de la substance du charbon, a dû se mêler aussi avec le schiste voisin, et dès lors ce n’est plus du schiste pur ou de la simple argile durcie, mais un composé de matière végétale et d’argile, un schiste limoneux imprégné de bitume, et qui dès lors a la propriété de brûler. Il en est de même de toutes les autres terres combustibles que l’on pourrait citer, car il ne faut pas perdre de vue le principe général que nous avons établi, savoir, que rien n’est combustible que ce qui provient des corps organisés.

Après avoir considéré la nature du charbon de terre, recherché son origine, et montré que sa formation est postérieure à la naissance des végétaux, et même encore postérieure à leur destruction et à leur accumulation dans le sein de la terre, il faut maintenant examiner la direction, la situation et l’étendue des veines de cette matière, qui, quoique originaire de la surface de la terre, ne laisse pas de se trouver enfoncée à de grandes profondeurs : elle occupe même des espaces très considérables et se rencontre dans toutes les parties du globe[1]. Nous sommes assurés, par des observations constantes, que la direction la plus générale des veines de charbon est du levant au couchant[2], et que quand cette allure (comme disent les ouvriers) est interrompue par une faille[3], qu’ils

  1. « La trace de charbon de terre qui m’est la mieux connue, dit M. Genneté, est celle qui file d’Aix-la-Chapelle par Liège, Hui, Namur, Charleroi, Mons et Tournai, jusqu’en Angleterre, en passant sous l’Océan, et qui d’Aix-la-Chapelle traverse l’Allemagne, la Bohême, la Hongrie… Cette traînée de veines est d’une lieue et demie à deux lieues de largeur, tantôt plus et tantôt moins ; elle s’étend sous terre dans les plaines comme dans les montagnes. » Connaissance des veines de houille, etc., p. 36.
  2. « Cette loi, quoique assez générale, est sujette à quelques exceptions : la mine de Litry en Normandie va du nord-est au sud-est, sur dix heures ; celle de Languin en Bretagne marche sur la même direction ; elle s’incline au couchant sur quarante-cinq degrés ; celle de Montrelais, dans la même province, suit la même direction. » Note communiquée par M. de Grignon. — « Celle d’Épinac en Bourgogne va du levant au couchant, inclinant au nord de trente à trente-cinq degrés. L’épaisseur commune est de sept à huit pieds, souvent de quatre, et quelquefois de douze et de quinze : la veine principale qu’on exploite est bien réglée et très abondante, mais elle est entrecoupée de nerfs. Le charbon est ardoisé et pyriteux, peu propre par conséquent pour la forge, à cause de l’acide sulfureux qui se dégage des pyrites dans la combustion, et qui corrode le fer dans les différentes chauffes qu’on lui donne. » Note communiquée par M. de Limare.
  3. « Les houilleurs du pays de Liège appellent faille ou voile un grand banc de pierre qui passe à travers les veines de houille qu’il rencontre en couvrant les unes, et coupant ou dévoyant les autres, depuis le sommet d’une montagne jusqu’au plus profond… Ces failles sont toutes inclinées… Une faille aura depuis quarante-deux jusqu’à cent soixante-quinze pieds d’épaisseur dans son sommet, c’est-à-dire au haut de la terre, et quatre cent vingt pieds d’épaisseur à la profondeur de trois mille cent quatre-vingt-deux pieds : les veines qui sont coupées par les failles s’y perdent, en s’y continuant, par de très petits filets détournés, ou enfin elles sautent par derrière au-dessus ou au-dessous de leur position naturelle, et jamais en droiture… Quelquefois, en sortant des failles, les veines se relèvent ou descendent contre elles avant de reprendre leur direction. » Connaissance des veines de houille, etc., pages 39 et 40. — Je dois observer que M. Morand a raison, et fait une critique juste de ce que M. Genneté dit au sujet des failles, dont en effet il ne paraît guère possible de déterminer les dimensions d’une manière aussi précise que l’a fait cet observateur. Voyez l’ouvrage de M. Morand sur le Charbon de terre, p. 868. — « Cette critique de ce que dit M. Genneté est d’autant plus juste que, par la planche 3 de son