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Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome III.djvu/346

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aient eu de temps immémorial des instruments de ce métal[1], leur art ne s’étend guère qu’à fondre le cuivre natif ou celui de troisième formation, et ils n’ont pas tenté de tirer ce métal des mines pyriteuses de seconde formation, qui exigent de grands travaux pour être réduites en métal.

Mais c’est surtout dans le continent du nouveau monde, et particulièrement dans les contrées de tout temps inhabitées, que se trouvent en grand nombre les mines de cuivre de première formation ; nous avons déjà cité quelques lieux de l’Amérique septentrionale, où l’on a rencontré de gros blocs de cuivre natif et presque pur ; on en trouvera beaucoup plus à mesure que les hommes peupleront ces déserts, car, depuis que les Espagnols se sont habitués au Pérou et au Chili, on en a tiré une immense quantité de cuivre : partout on a commencé par les mines de première formation qui sont les plus aisées à fondre. Frézier, témoin judicieux, rapporte « que dans une montagne qui est à douze lieues de Pampas du Paraguay et à cent lieues de la Conception, l’on a découvert des mines de cuivre si singulières qu’on en a vu des blocs ou pépites de plus de cent quintaux ; que ce cuivre est si pur que, d’un seul morceau de quarante quintaux, on en a fait six canons de campagne de six livres de balle chacun, pendant qu’il était à la Conception ; qu’au reste, il y a dans cette même montagne du cuivre pur et du cuivre imparfait, et en pierres mêlées de cuivre[2]. »

C’est aux environs de Coquimbo que les mines de cuivre sont en plus grand nombre ; et elles sont en même temps si abondantes qu’une seule, quoique travaillée depuis longtemps, fournit encore aujourd’hui tout le cuivre qui se consomme à la côte du Chili et du Pérou. Il y a aussi plusieurs autres mines de cuivre à Carabaya et dans le corrégiment de Copiago[3] : ces mines de cuivre du Pérou sont presque toujours mêlées d’argent, en sorte que souvent on leur donne le nom de mines d’argent, et l’on a observé qu’en général toutes les mines d’argent du Pérou sont mêlées de cuivre, et que toutes celles de cuivre le sont d’argent[4] ; mais ces mines de cuivre du Pérou sont en assez petit nombre, et beaucoup moins riches que celles du Chili ; car M. Bowles les compare à celles qu’on travaille actuellement en Espagne[5]. Dans le Mexique, au canton de Kolima, il se trouve des mines de deux sortes de cuivre, l’une si molle et si ductile que les habitants en font de très beaux vases, l’autre si dure qu’ils l’emploient au lieu de fer pour les instruments d’agriculture[6] ; enfin l’on trouve des mines de cuivre à Saint-Domingue[7], et du cuivre en métal et de première formation au Canada[8] et dans les parties plus septentrionales de l’Amérique, comme chez les Michillimakinacs[9], et aux environs de la rivière Danoise,

  1. Il y a des mines de cuivre très abondantes dans un lieu nommé Soudi, qui n’est pas loin d’Abissina. Les forgerons nègres se rendent à Soudi vers le mois de septembre et s’occupent à le fondre jusqu’au mois de mai. Idem, t. IV, p. 592.
  2. Voyages à la mer du Sud. Paris, 1732, p. 76 et 77.
  3. Histoire générale des voyages, t. XIII, p. 412 et 414.
  4. Barba, Métallurgie, t. Ier, p. 107 et 108.
  5. La mine de cuivre de Carabaya, dans le Pérou, contient le même quartz, la même marcassite et la même matrice d’améthyste que la nouvelle mine de cuivre que l’on travaille à Colmenaoviejo, à six lieues de Madrid. — Celle de cuivre vert de Moquagna, dans le Pérou, est presque la même que celle de Molina d’Aragon. Histoire naturelle d’Espagne, par M. Bowles, p. 28.
  6. Histoire générale des voyages, t. XII, p. 648.
  7. Idem, ibid., p. 218.
  8. Sur les bords du lac Érié, au Canada, on a vu des blocs de cuivre rouge tout régulisé et qu’on a employé sans aucune préparation : on soupçonne que cette mine est dans le lac même. M. Guettard, Mémoires de l’Académie des sciences, année 1752, p. 216.
  9. Il y a du cuivre presque pur et en grande quantité aux environs d’un grand lac, au pays des Michillimakinac, et même dans les petites îles de ce lac ; on a travaillé de ce cuivre